Esdras Ponce Cuffe avait décidé de ranger ses affaires. Après tout, il les avait déranger pour déranger ces colocataires, comme tous les ans, mais au fil du temps, ils s’y étaient habitués au point de devenir pires que lui, du moins de son point de vue. Il était difficile de vivre avec certaines personnes tels que Cupid, Bahlos et Dehloss. Et franchement, cela commençait à ressembler à un nid de strangulots dans cette chambre de mâles, où finalement Esdras ne s’était jamais bien intégré. Pourtant, en grand gentleman moderne, presque avant-gardiste, notre cher et très apprécié Serdaigle, hum hum, commença son nettoyage, conformément à l’émission C’est du Propre, mais en plus glamour. Oui, on parle d’Esdras pas des quinquagénaires croupissant dans les déchets des autres, armées de gants et d’aspirateurs incroyables sortis du téléachat de M6. Vous avez remarqué le message subliminal ? Non, je ne fais pas de la pub pour une chaîne privé, je valorise ce qu’on apprend dans le seul programme télé vendu par mon libraire, à un kilomètre de chez moi ! Revenons à nos harpies. Esdras se trouvait armé de sa baguette, d’un livre à la main, et comme Mary Poppins, il s’essaya aux sortilèges ménagers. Seul problème : la baguette d’Acacia ne l’avait pas entendu de cette oreille (de bois). Et oui, c’était un bois arrivé à une certaine maturité magique dans les mains d’un fou de magie complexe tel que le petit fils du mec le plus influent du monde magique. Enfin, c’était l’excuse qu’il allait servir quand, décidé à faire ch*er le monde, Bahlos verrait son coin de chambre teinté de rose, les aigles sculptés dans le bois étant devenus de ravissant poneys. Son travail enfin fini, il décida quand même se s’occuper de ses affaires.

Quelques minutes plus tard, ayant un peu abandonnés sa bonne volonté, il s’était allongé sur le lit de Bahlos, parce qu’il venait de refaire le sien, et s’était emparé d’un de ses livres pour y griffonner à l’aide d’un feutre. Esdras n’était pas du tout un gamin insupportable. Il savait la portée de son geste ; ses cheveux le prouvaient. Ils tiraient vers le noir, signe irréfutable de sa concentration. Son but était de rendre Bahlos complétement fou. Le faire devenir vraiment méchant. Après tout, il s’en foutait de s’en prendre une, ça se soignait, mais il voulait prouver quelques chose. Il voulait prouver qu’il était meilleur que Père Teresa. C’était son orgueil qui parlait et sa volonté de contrôler ceux qu’il côtoyait. Il ne recherchait que le fun dans cette pratique. C’était sa manière à lui de s’amuser. Et ce totalement gratuitement. Bien sur, ce qui était difficile, c’était de devoir composer avec Cupid. Le préfet-en-chef. Madame le Shériff tel que le surnommait Esdras. Il ne le détestait pas, d’ailleurs il ne détestait personne au fond. C’est juste que le genre humain le rendait ignoble. C’était peut-être sa manière à lui de montrer son affection… Oui enfin, non. Personne ne peut trop savoir d’où venait son ignominie. Cela dit, il s’amusait bien à se faire détester ce petit emmerdeur. Et on lui rendait bien. Mais c’était un cerveau, et on avait toujours besoin d’un cerveau avec soi. Ca expliquait pourquoi on ne le bizutait pas et pourquoi on lui parlait encore ; à partir de là, pourquoi se remettre en question ? C’est vrai quoi, si on n’était pas capable de prouver concrètement que c’était une sous-merde parce qu’on avait quand même des fois besoin de lui, même deux fois sur l’an, alors pourquoi changerait-il ? En plus, vu comment la Garce, comprendre Gabriel Vincentelli, le collait, c’est qu’Esdras devait être un minimum attirant. Il n’avait rien du boulet du coin. Le jeune sorcier était un peu le Docteur House de Poudlard. On s’attachait à ces sales coups. On a toujours besoin de quelqu’un qui nous rappelle à la dure réalité des choses.

Ayant passé une heure dans le dortoir, voire un peu plus, il décida qu’il était temps de s’en aller, après avoir transformer et défait les affaires de Bahlos. Malheureusement, trop sur de lui, il sembla soudain qu’Esdras avait oublié quelques chose… Ah oui ça baguette. Où l’avait-il mis avant de dessiner dans le manuel de son coloc’ ? Après s’être traité d’abruti, Esdras s’était pencher pour regarder sous le lit « roséifié », jusqu’à s’être retrouvé complétement en dessous, saisissant sa baguette et entendant arriver ce qui ressemblait à un flagrant délit.

Faire sortir de ses gonds une personne telle que Bahlos n'était pas chose aisée, Dehloss savait le faire, c'était là la force de l'expérience et de la connaissance. Dans sa chambrée il y avait aussi Cupid, qui était un allié de poids, même si ses relations avec Dehloss étaient souvent tendues. Le dernier membre de leur chambrée... Esdras... il n'y avait rien à dire par rapport à lui. Un garçon vraiment étrange, dont le passe-temps favori était de donner des surnoms idiots à ses camarades et à tenter de les mettre sur les nerfs. Cependant aujourd'hui n'était pas un jour comme les autres et si Bahlos était de bonne humeur depuis la fin de son premier cours, il y avait fort à parier que cet état de fait ne durerait guère. Esdras étant le petit-fils d'un homme influent, il semblait à l'héritier Goshawk qu'il avait obtenu le pire de cette caste. C'était un jeune homme imbu de lui-même et qui pensait avoir le monde à ses pieds. Un peu comme son grand-père. Ce que l'élite avait toujours pour habitude d'oublier était pourtant primordial. Ils n'avaient pas toujours été au sommet. Et si les Cuffe se pensaient intouchables, c'était parce qu'ils n'avaient pas encore affronté le cyclone Goshawk, dont les tornades étaient aussi appelées Wright.

Arrivé dans la salle commune de Serdaigle, Bahlos aperçut son ami de toujours à qui il adressa un regard entendu. Bientôt côtes à côtes ils discutèrent rapidement de leur journée, échangeant les informations, rumeurs et derniers bruits de couloirs qui leur étaient parvenus. N'ayant plus rien à se dire d'important, ils se quittèrent, Bahlos retournant à ses préoccupations du moment, soit se changer les idées en s'affalant sur son lit. Il espérait de tout coeur n'avoir personne à qui parler dans sa chambre. Il ne faisait pas toujours attention à Esdras, ils n'étaient pas vraiment amis, en réalité il l'indifférait au plus au point, ses jeux de piques n'avaient qu'un seul but. L'énerver et ça, Bahlos l'avait bien saisi, aussi ne pas répondre aux provocations lui semblait être la meilleure façon de ne pas encourager l'héritier Cuffe. Bahlos dont second prénom était Constant, ce qui résumait en fait l'apparence qu'il donnait aux yeux du monde, n'était pas du genre à attaquer de front. S'ils formaient avec Dehloss et Cupid une si bonne équipe c'était parce qu'ils avaient un don commun pour obtenir ce qu'ils voulaient sans avoir à se battre.
N'en pensez pas pour autant qu'il n'avait aucun talent magique, bien au contraire, descendant de Miranda Goshawk, il avait dès son plus jeune âge baigné dans la magie la plus complexe et ses capacités en matière de magie étaient plus que redoutables.

Comme susdit, il espérait ne trouver personne, aussi quand il entra dans la chambre et qu'il découvrit Esdras à moitié sous son lit, semblant chercher à attraper quelque chose. Son lit ? Rose ? Des poneys ? Quel abrut ! Ce type n'avait-il donc aucune vie ? Cette petite blague n'était pas du goût de Bahlos, mais en dehors de son caractère enfantin, il lui semblait que c'était la preuve qu'il attendait depuis longtemps. Le petit-fils Cuffe n'avait rien à faire dans sa vie, aucune ambition personnelle, avoir un nom devait lui suffire, puisqu'à l'évidence c'était tout ce qu'il avait pour lui. Et son petit cul, mais ça c'était une autre histoire. « Je ne pense pas que tu trouveras ta dignité sous mon lit Esdras. » Acide, acerbe, Bahlos n'avait pas l'intention de laisser gagner Esdras, se mettre en colère n'était pas une option. En s'approchant de son lit, rose, sur lequel il jeta la besace qui lui servait de sac de cours, il toucha la statuette de bois en forme de poney. « C'est très gay tout ça, une façon de faire ton coming-out ? Tu sais, avec Gabriel qui te tourne autour, on a tous compris depuis longtemps dans quel camp tu es... »  Sortant sa baguette Bahlos redonna à son lit sa couleur d'origine. Les statuettes, il les laisserait quelques jours, pour qu'Esdras puisse se gargariser d'avoir fait une blague stupide. S'allongeant sur lit il vit un de ses livres. Il avait osé écrire dessus... Ce n'était même pas de la provocation, pas même de la bêtise, juste du mépris et de l'ignorance. La richesse matérielle d'Esdras allait de paire avec sa pauvreté intérieure apparemment. Et gaspiller son temps, son énergie et l'argent de Bahlos semblait lui faire un plaisir fou. Du calme, du calme. Le laisser gagner n'était pas envisageable, il fallait qu'il s'en souvienne.

Esdras sorti la tête du dessous du lit et regarda Bahlos Goshawk d’un air tout à fait d’accord, avec sa remarque. Notre Serdaigle ne s’était jamais embarrassé avec une dignité quel qu’elle soit, ce n’était pas quelqu’un de spécialement fier ni d’attacher à une certaine image. La preuve, c’était un emmerdeur et il serait longtemps considéré comme tel.  Il était égoïste, oui, et un peu prétentieux sur les bords. Il savait qu’il était doué, ça l’excuse à moitié. Se relevant, il fit tournoyer sa baguette dans sa main avant de la ranger droit dans sa poche. Ensuite, l’héritier Cuffe épousseta son pantalon et répondit sur un ton nochalant en regardant son interlocuteur dans les yeux. « Tant mieux ! Si tu savais le temps que j’ai mis à m’en débarrasser… Ca s’accroche ces bêtes là ! » Voyant Bahlos se réinstaller sur son lit et découvrir le livre gribouiller, Esdras décida qu’il était de bon ton de poursuivre cette conversation qui s ‘annonçait plus qu’amusante. Il fallait que son voisin de chambre extériorise sa colère. Il allait imploser sinon. Et qui devra se ramasser le ménage à la fin ? Les elfes de maisons ! Toujours eux, les pauvres animaux. Le métamorphomage prit une chaise et allongea ses pieds sur la commode de Goshawk, virant au passage un tas d’affaire, enfin en tombant elles formèrent un tas d’objets intacts mais qu’il ne prit pas le temps d’identifier. Ce qui appartenait à Bahlos était une chose qui était aussi inintéressante que le nombre de dents sur le dentier de mémé.

Après tout, griffonner dans un livre de Bahlos répondait à une logique. Il descendait d’une auteure célèbre qui s’était fait du pognon en écrivant des manuels scolaires. On ne peut pas vraiment parler d’un exploit. Elle s’était juste fait des gallions sur une voie de garage. Quelques séances d’autographes chez Fleury et Bott et voilà ! Elle était prête à se consacrer à une descendance. Et quelle descendance ! Bahlos n’était pas moche, bon il n’était pas non plus spécialement beau. Il était en revanche bien foutu et ça, si Esdras avait une quelconque libido, il ne se serait pas privé de le mater ostensiblement et même de tenter quelque chose. Mais, la réalité des choses nous rattrapant toujours, notre bien aimé emmerdeur était insensible à toute attirance sexuelle. Ce qui ne l’empêchait pas de pouvoir tomber amoureux, certes, mais pas d’un corps. Et à ses yeux, Bahlos ne demeurait qu’un corps, fade et sans saveur, incapable d’un peu de fantaisie ou d’émotions fortes. C’était une sorte de plante verte blasée qui se contentait de tourner la tête vers les soleils qui pouvaient rendre moins ternes sa triste existence qui lui semblait tellement complexe alors que finalement, il donnait l’impression de se laisser vivre avec une nonchalance peu commune. C’était un peu de famille de se laisser vivre, de se ranger dans des modes de vie plutôt voie de garage et d’essayer de prendre de la consistance en… En faisant quoi déjà ? Esdras connaissait tellement peu Bahlos de manière personnelle qu’il ne saurait dire quelles étaient ses matières favorites, ni encore si il faisait partie d’un quelconque groupe d’élèves. Esdras avait résolu ce problème en s’autosuffisant. Pas d’amis, pas de soucis.

« On se calme Père Teresa. On me l’a déjà fait cent fois le coup du camp parce que Gabriel et bla bla bla. Et dire qu’au moins je te pensais intelligent. Enfin, je ne changerai jamais de chambre. Tu comprends, j’aime trop l’ambiance de frères qui s’est installée entre nous... ou plutôt entre vous. Et puis, j’aime tellement vous laisser des mots doux dans vos bouquins. Comme ça vous ne pouvez plus vous passer de moi. En revanche, change de coupe de cheveux, parce que là c’est pas possible. Je sais que ta famille reste dans les manuels pour première année tout au long de sa triste vie, mais c’est pas une raison pour sortir avec une tronche pareille. Tu pourrais passer à côté de la femme… Ah non pardon du manche de ta vie. Je dis ça, je dis rien hein bro’ »