Look into my eyes, it's where my demons hide, don't get too close, it's dark inside. Demons - Imagine Dragons.

Introduction à la généalogie Lindqvist
Un petit tour d'horizon de la famille Lindqvist, histoire de se mettre dans le contexte. Nilas Lindqvist, grand père paternel de Sven, est né en Suède, prêt de Hudiksvall. La famille Lindqvist était à l'époque fabricante de bijoux de génération en génération, accumulant ainsi une fortune qui faisait d'eux l'une des dix familles les plus riches de Suède. A la demande de la famile Blomsson et avec la promesse d'un mariage fructueux à la clé, les Lindqvist soutenurent financièrement la campagne éléctorale de Vladig Zertemberg. Ce dernier remporta les éléctions et nomma Joan Blomsson au poste de premier ministre. Sa seconde fille, Elisa Blomsson, épousa donc comme il était promis Nilas Lindqvist lorsqu'il eut 23 ans. Elle lui donna 5 enfants, ainsi qu'une notoriété enfin reconnue au nom de Lindqvist. Levi, Xander, Finnigan, Dante et enfin Fiona, la petite dernière, naquirent tous à environ 2 ans d'intervalle. A la mort de ses parents, Nilas hérita de toute la fortune et vendit l'entreprise à des acquéreurs anglais pour se consacrer à sa vie de famille. Levi devint un joueur de hockey sur glace renommé et fut pris dans l'équipe nationale à l'âge de 20 ans. Xander voua un culte à la politique, voulant faire comme son grand père maternel, il s'enfonça vaillament dans de coûteuses études de droit qui le menèrent à un poste d'avocat. Finnigan, lui, entra une école de commerce. Dante, plus renfermé que ses frères, quitta la demeure familiale à l'âge de 18 ans, prétendant vouloir réussir par lui même, et ne réapparut plus jamais. Fiona, atteinte d'une maladie orpheline qui ne lui permettait ni de marcher ni de parler, resta sous la protection de son frère Finnigan durant toute sa courte vie, et grandit dans la famille le plus secrètement possible. Elisa et Nilas finirent par se tuer dans un accident de voiture un 27 juin et Dante restant introuvable, l'héritage fut partagé en 4. Levi rompit peu à peu contact avec ses frères et soeur après avoir été contacté par un entraineur étranger qui le poussa à faire ses valises pour partir faire sa carrière de sportif ailleurs. Une fois ses études terminées, Finnigan resta dans la demeure familiale pour veiller sur Fiona, qui s'éteignit à l'âge de 21 ans, épuisée par son combat contre la maladie. A son enterrement, les médias parlèrent beaucoup, car seuls Xander et Finnigan furent présents. Détruit par la perte de sa soeur, ce dernier quitta la Suède pour partir travailler en Irlande, où il fit la connaissance de Kate Williams. Kate était une velane qui n'avait malheureusement que très peu de talent pour la magie, mais qui était très douée en filtre magique. Elle tomba amoureuse de Finnigan sans avoir le bonheur de recevoir son amour en retour. Mais étant certaine qu'il s'agissait de l'amour de sa vie, elle décida de le faire sien et c'est par le biais d'un philtre d'amour très puissant que ce dernier reçut soudain le coup de foudre pour Kate, qu'il épousa deux ans après leur rencontre. Il lui offrit tout ce qu'il était capable de lui donner et eut avec elle deux enfants. Rafaël qui fut suivit un an plus tard de Sven. Le premier accouchement ayant rencontré de graves difficultés, les médecins déconseillèrent à Kate de faire un second enfant. Elle tomba pourtant enceinte et refusa qu'on lui enlève, mais elle ne survécut pas à ce deuxième effort.

Les origines du mal

Souvenir n°1.
11 mars ; 12h34

JANE -Rafaël ! Sven !
Sven cessa de regarder la télé tandis que Rafaël dévalait les escaliers. Les deux têtes brunes firent apparution dans la salle à manger et Jane la gouvernante leur fit signe de se laver les mains avant de venir s'installer à table.
SVEN - Jane, j'aurais le droit de retourner jouer dehors après ?
JANE -Bien sur, tu...
Elle ne finit pas sa phrase car leur père venait d'arriver. La jeune femme se raidit et quitta la pièce tandis qu'il s'asseyait en silence, un verre de bordeaux à la main qu'il posa à côté de son assiette avec un grognement satisfait. Il buvait toujours beaucoup sans chercher à savoir pourquoi. Il avait pris l'habitude de boire depuis la mort de son épouse et ne s'était jamais arrêté.
FINNIGAN - On retire les coudes de la table et on se tient droit.
Rafaël ramena ses mains sur ses genoux, une moue ennuyée accrochée aux lèvres. Sven eut un petit sourire face au comportement de son frère mais ne dit rien, gardant les yeux rivés sur son assiette, attendant patiemment.
[...] Donne-nous aujourd'hui notre pain de ce jour. Pardonne-nous nos offenses, comme nous pardonnons aussi à ceux qui nous ont offensés. Et ne nous soumets pas à la tentation, mais délivre-nous du mal. Amen.
Ils passèrent à table et les seuls bruits audibles durant tout ce temps ne furent que le cliquetis des couverts sur les assiettes en porcelaine. Le contact entre Finnigan et ses deux enfants n'avait jamais été amical. Dès la naissance de Sven, monsieur Lindqvist prit à son service une gouvernante qui s'était entièrement chargée de l'éducation des garçons. Il ne serra jamais dans ses bras ni l'un, ni l'autre, préférant l'amour sans contrepartie de sa bouteille de vin à celui plus capricieux d'enfants naifs.
FINNIGAN - Vous avez fait vos devoirs avec Jane ce matin ?
Sven et Rafaël se regardèrent brièvement et ce fut l'ainé qui leva bravement la tête vers son père le premier.
RAFAEL - Il faisait beau alors Jane nous a autorisé à sortir dehors... Elle a dit qu'on travaillerait ce soir...
FINNIGAN - Il me semble pourtant avoir été clair sur ce sujet...
Les deux enfants s'observèrent à nouveau. Leur père criait rarement. En général il se contentait de hausser légèrement le ton, parlant d'une voix cassante et froide. Ils se recroquevillèrent pourtant légèrement sur eux mêmes, conscients qu'une giffle ou pire était vite arrivée lorsqu'il avait un peu trop but.
FINNIGAN - Un jour l'un de vous deux héritera de ma fortune, il est hors de question que j'offre tout ceci à un idiot. Vous avez un emploi du temps, est-ce vraiment trop demandé que vous le respectiez ? Vous êtes donc incappable de faire ça pour l'amour de votre père ? Vous me faites beaucoup de peine... et à votre mère aussi...
SVEN - Mais papa, on a jamais le temps de s'amuser. Protesta le plus jeune, et il sut immédiatement qu'il avait eu tord de prendre la parole alors même que le regard glacial et méprisant de Finnigan se posait sur lui.
FINNIGAN - Puisque tu as l'air de porter plus d'importance à l'amusement qu'au travail et à la digne récompense de ces efforts, tu viendras dans mon bureau après manger et tu travailleras avec moi.
Sven baissa les yeux sur son assiette, triturant le bout de sa fourchette. Il sentit un soupçon de peur venir se blottir au creux de son ventre, lui nouant l'estomac. Plus que tout, il désirait faire la fierté de son père, mais voir les autres enfants jouer sans qu'il n'ait l'occasion d'y participer lui donnait parfois l'impression d'être seul au monde.
SVEN - Oui papa... Murmura t'il tout bas.
Le dessert arriva, mais il fut incapable d'en avaler.

Souvenir n°2
11 mars ; 15h08

Sven observait le jardin par la baie vitrée. Marvel, le doberman qui gardait le manoir, parcourait actuellement la pelouse, la truffe au sol, sans doute à la recherche d'un animal quelconque. Ses oreilles ne cessaient de se mouvoir, à l'affût du moindre son. Joyeux, il bondissait et courait. Le manège du chien captivait l'enfant. De toute manière, tout ce qui pouvait le détourner de ses pensées était le bienvenu. Il entendit la porte du bureau de son père s'ouvrir et il se retourna pour voir ce dernier la refermer dans son dos. A clé.
FINNIGAN - Tu as apporté tes devoirs ?
SVEN - Oui.
FINNIGAN - Oui papa.
Sven baissa les yeux. Son père s'approcha de lui et attrapa une mèche de ses cheveux, l'entortillant entre ses doigts. Mais contrairement à d'habitude, cela n'avait rien d'une marque quelconque d'affection. En cet instant, le garçon n'avait qu'une envie, s'enfouir dans le sol le plus profondément et ne plus jamais ressortir.
FINNIGAN - J'espère au moins que tu sais pourquoi tu es là.
L'enfant se mordit la lèvre inférieure.
SVEN - Rafaël et moi... on voulait juste s'amuser un peu. Chuchota t'il timidement.
Il savait qu'il ne devait pas tenir tête à son père. Il allait être puni. Il aurait tellement aimé réussir à obtenir davantage d'attention de sa part, mais pour ça il fallait travailler, et travailler encore. Finnigan n'avait jamais cessé de vanter les mérites d'une rude labeur. A ses yeux, seul comptait la réussite et le progrès. La distraction était autorisée à ceux qui n'avaient plus rien à prouver, aux meilleurs. Et pour le moment, ni Sven ni Rafaël n'étaient les meilleurs. La main de son père dériva vers sa gorge qu'il survola. Ses doigts sentaient le vin.
A partir de maintenant, Sven se jura de ne plus rien dire. Il ne ferait rien, il se tairait, il se détacherait de ce monde. Il ne penserait qu'à Marvel et à sa course folle dans le parc du manoir...
FINNIGAN - Tu as toujours été beaucoup plus obéissant une fois allongé, n'est ce pas Sven ?

Souvenir n°3
23 mai

FINNIGAN - L'important, c'est d'être toujours le meilleur. Tu ne dois faire confiance à personne car n'importe qui peut te surpasser... Il y a toujours quelqu'un qui cherchera à profiter de tes faiblesses, c'est pour ça qu'il vaut mieux ne pas en avoir, tout simplement.
Le père glissa une main dans les cheveux de Rafaël et celui ci eut un sourire de bonheur pur. Les moments de tendresse de Finnigan étaient tellement rares que les deux frères étaient en perpétuels conflits de jalousie dès que l'un d'eux y avait droit et pas l'autre.
RAFAEL - Même meilleur que Sven ?
FINNIGAN - Tu pourrais être meilleur que lui si tu le voulais vraiment.
RAFAEL - Je le surpasse déjà, hin papa ?
Etre le plus doué. C'était tout ce qui comptait. Sven fit irruption dans la pièce et son regard se posa sur la main de son paternel, posée sur la tête de son grand frère dans un geste de protection. Il plissa des yeux, incapable de contenir son agacement.
FINNIGAN - En effet.
Il retira sa main et porta son attention sur son second fils, qui n'avait pas bougé. Sven sentit les battements de son coeur ralentir subitement. Il pouvait voir dans le gris de ses iris tout le mépris qu'il lui inspirait. Si seulement il avait put avoir droit à une caresse lui aussi, sa journée aurait été parfaite. Mais Rafaël avait eu de meilleurs résultats que lui ces derniers temps et il récoltait toute la gloire. Il le détestait tellement. Il détestait devoir se battre continuellement avec lui pour briller aux yeux de leur père, il détestait ce dernier qui les encourageait chaque jour davantage à la compétition.
FINNIGAN - Tu es venu me dire quelque chose Sven ? Je te conseille de retourner travailler dans ta chambre vu les notes que tu as rapporté au dernier trimestre, tu n'as pas de quoi être fier.
Rafaël eut un rire moqueur.
La colère est une émotion vive, puissante et parfois incontrolable. Si Rafaël avait hérité de l'hypocrisie de sa mère, Sven, lui, possédait la hargne de son père. Il serra les dents, crispa les poings. Il avait plus que jamais envie de frapper son frère, lui briser la machoîre, le faire hurler... Sa rage enfla dans sa gorge, et il se fit violence pour faire taire le grondement animal et haineux qui ne demandait qu'à sortir de ses lèvres tirées en un sourire mauvais.
SVEN - Je... voulais juste dire que Jane te cherchait.
Finnigan haussa les sourcils, puis il repoussa gentiment Rafaël et se leva.
FINNIGAN - Attendez moi là tous les deux.
Il sortit du bureau et ils entendirent le bruit de ses pas disparaitre peu à peu à mesure qu'il s'enfonçait dans les couloirs du manoir.
Sven n'attendit pas une minute de plus. Il se jeta sur Rafaël. Il avait beau avoir un an de plus, ils étaient du même gabarit et il l'attrapa à la gorge, lui faisant un croche pied. Ils se retrouvèrent tous les deux par terre, le choc de leurs corps fluets sur le plancher résonna violemment. Rafaël hurla et l'attrapa par les cheveux, lui donnant des coups de pieds tandis que Sven le secouait, serrant ses doigts autour de son cou mince et fragile.
SVEN - JE SUIS MEILLEUR QUE TOI ! Cracha t'il alors qu'il maintenait sa tête au sol. Rafaël le frappa au visage. Du sang coula. Le sien ou celui de son frère ? Qu'importait.
RAFAEL - Tu sers à rien ! C'est moi qu'il préfère ! Moi !
Les vêtements de Rafaël prirent feu. Ils hurlèrent de terreur à l'unisson et s'écartèrent l'un de l'autre alors que l'ainé retirait sa chemise le plus rapidement possible, criant de douleur et d'horreur. Des brûlures sévères apparaissaient déjà sur sa peau blanche.
RAFAEL - T'ES UN MONSTRE !
Choqué, Sven courut se réfugier dans un coin de la pièce alors que les flammes grandissaient encore, noircissant déjà le bois de la bibliothèque murale. Rafaël sortit de la pièce en pleurant. L'alerte incendie se déclencha. Une pluie fine se mit à tomber et l'enfant resta immobile. Il n'avait pas voulu faire ça. Ce n'était pas de sa faute. Ce n'était pas lui. Ce n'était pas possible...

Souvenir n°4
26 mai ; 9h58

P - Tu avais un briquet sur toi ?
SVEN - Je n'ai rien fait.
P - Tu as mis volontairement le feu à la chemise de ton grand frère. Peux-tu au moins m'expliquer la raison de ce geste ?
SVEN - Je n'ai rien fait.
L'enfant releva le visage vers le psychologue qui l'observait d'un air grave. Il le fixa droit dans les yeux, essayant de lui faire comprendre par la pensée qu'il n'y était pour rien. Mais son regard dériva sur la croix que l'homme portait à son cou. Il devait le croire fou, ou bien possédé. Pourtant, il n'avait rien fait.... rien fait du tout. Il n'arrivait pas à expliquer d'une manière rationnelle ce qui s'était passé, ce jour là. Le lendemain, lorsque son père l'avait enfermé dans sa chambre, il s'était épuisé à taper sur la porte pour s'échapper. En vain. Il avait été tellement en rage... Et un vase s'était brisé. Heureusement, il avait réussi à cacher les dégâts à temps, et personne n'était au courant à part lui. Il semblait évident que la perte du contrôle de ses émotions provoquaient des évènements étranges, depuis l'incendie... Mais il ne savait pas pourquoi, et ça le terrifiait. Etait-il maudit ? Son âme était-elle bonne à jeter en Enfer ? Il fallait absolument qu'il arrête de s'énerver. Qu'il garde la maitrise de lui même pour que tout ça cesse... Mais à 12 ans, rien n'était moins aisé.
P - Tu as une bonne relation avec Rafaël, Sven ?
Sven fronça les sourcils. Ce genre de chose, ça s'appelait contourner le problème...
SVEN - Oui ! Puisque je vous dis que je n'ai rien fait !
P - Je te crois. Calmes toi. Alors comment expliques-tu ça ? Donnes moi ta version des faits dans ce cas. Je suis là pour t'écouter et t'aider, tu le sais.
Le garçon passa la main dans ses cheveux et l'espace d'une demie seconde, se les tira brusquement pour s'empêcher de hurler. C'était un tic qu'il avait depuis déjà plusieurs années. Se tirer les cheveux pour reprendre ses esprits. C'était étrange n'est ce pas ? Lui même trouvait ça bizare.
SVEN - Monsieur... Je suis désolé mais je ne sais pas...
Le psychologue soupira et nota le résumé de la discussion sur son carnet. Puis il se leva et alla ouvrir la porte au paternel qui attendait dans la salle d'attente. Ce dernier jeta un bref coup d'oeil à son enfant avant de reporter son attention sur l'homme en costard.
P - Votre fils a refusé de coopérer pour aujourd'hui, une seconde séance sera nécessaire si vous voulez mon avis... Je dirais qu'il est encore sous le choc, il faut lui laisser le temps, de toute évidence il ne voulait pas blesser son frère mais il l'a fait quand même et il finira bien par nous expliquer pourquoi. Il faut juste du temps...
Sven sentit une boule de rage lui enflammer les veines. Il devait se contenir... Il ne voulait pas que quelque chose d'étrange se produise maintenant... Tandis que le psychologue et son père discutaient encore, il se leva et quitta la pièce. Il était différent, mais il n'était pas un monstre... Du moins, il l'espérait.

Souvenir n°5
Deux ans plus tard, un certain 2 août aux alentours de 16h00

Sven et Rafaël s'approchèrent de la porte entre ouverte du bureau de leur père. Un inconnu avait sonné une heure plus tôt et avait prétendu pouvoir résoudre le "problème" de Sven. Il parlait bien sur de ces "trucs bizares" qui se provoquaient chaque fois qu'il s'énervait. Même s'il avait appris à se contrôler, il lui arrivait encore de craquer et de casser certaines choses dans une pièce sans même l'avoir toucher. Une fois il avait même fait voler une tasse qui était allée s'éclater contre un mur.
Les deux enfants tendirent l'oreille mais n'entendirent presque rien car l'homme ne parlait pas d'une voix très haute... Mais apparement, ce qu'il disait était grave, puisque leur père se leva brusquement de son fauteuil.
FINNIGAN - QUOI ?
Il se mit à tourner en rond comme un lion en cage, les yeux écarquillés. Sven pouvait voir au soulèvement de son torse que sa respiration s'était accélérée et qu'il avait du mal à reprendre son souffle. Que lui avait-dit l'inconnu de si choquant pour le mettre dans un tel état ?
Ce jour là, Finnigan apprit la vérité sur sa femme. Il apprit qu'il ne l'avait aimé que grâce à un philtre d'amour, il apprit qu'elle était une vélane et que seul Sven avait hérité de cette part d'elle qui était extrèmement rare chez les individus de sexe masculin. Il apprit que son fils était un sorcier, et lorsque l'inconnu lui tendit la lettre d'admission à l'école de Poudlard, il faillit s'évanouir. Il reprit pourtant bien vite ses esprits et s'enferma dans son bureau durant tout le reste de la journée, une fois que l'inconnu en sortit. Ce dernier prit d'ailleurs Sven à part pour lui parler de tout ceci, et ce fut au tour de l'enfant de manquer défaillir. Mais il accepta bien plus vite cette vérité que Finnigan, même s'il était terrifié à l'idée de se rendre dans une école où on lui enseignerait la sorcellerie. Etait-il un monstre ? Il était toujours autant incapable de répondre à cette question... L'angoisse lui serrait le coeur. Toute sa vie n'avait été que contradictions. La religion dans laquelle il avait grandit répudiait la sorcellerie. Combien d'histoires n'avait-il pas lut, où on brûlait les mages, où on les noyait ? Tout cela tournait en rond dans son esprit et lui donnait envie de se cogner la tête contre les murs.

Souvenir n°6
Deux jours avant le grand départ.

Il était sur la moquette. Sa vision tentait de se focaliser sur le plafond, mais il voyait flou malgré tout ses efforts. Il se recroquevilla sur le côté et cessa tout mouvement. Peut-être avait-il peur que son père ne le remarque, se souvienne de sa présence et recommence. Il était faible. Il se promit de remédier à ça le plus rapidement possible, mais il fallait déjà qu'il parte loin d'ici. Finnigan se rhabillait lentement à côté de lui, il voyait sa silhouette se dessiner sur le mur, éclairée par la lumière tamisée que diffusait l'unique lampe murale...
Sven n'arrivait plus à avoir une seule pensée cohérente. Il ferma les yeux pour empêcher les souvenirs de remonter trop brusquement, mais les réouvrit. Il voulait pouvoir anticiper les mouvements de son père. Il avait mal. Mais ça non plus, il ne voulait pas y penser... Il voulait juste pouvoir vider son esprit et se perdre dans l'oubli le plus complet, le plus total. Le trou noir, c'était ça la vraie liberté.
Son père le toisa, puis il attrapa le poignet que Sven avait replié contre sa poitrine pour le forcer à se rallonger sur le dos. L'adolescent se laissa faire, n'ayant aucune envie de résister. Non, aucune envie, ce n'était pas la vérité. Il ne pouvait pas résister. Il avait peur de résister. Il plongea son regard brun dans celui gris acier de son père.
SVEN - Non... S'il te plait. Murmura t'il simplement.
Finnigan se pencha lentement vers lui. Il avait dans les yeux une haine qui n'était pas réellement destinée à son fils... Le visage de marbre, il chuchota :
FINNIGAN - Je devais bien ça à Kate.


Dragon Rouge


Souvenir n°1
Premier jour

C - Serpentard !
Des applaudissements et des hurlements parvirent de la table la plus à droite, alors que Sven se levait, les jambes flageolantes pour rejoindre sa nouvelle famille. Serpentard... Comme les serpents. Il avait mis le Choixpeau sur la tête et ce dernier lui avait chuchoté des rêves d'ambition et de gloire... de revanche aussi, d'orgueil... Serpentard donc. Il s'assit à côté d'un blond qui, s'il se rappelait bien, se nommait Jeffrey et avait été placé quelques minutes avant lui.
JEFFREY - Salut, moi c'est J...
SVEN - Jeffrey, je sais.
Il lui serra la main, un peu désorienté. Son voisin eut un petit sourire amusé.
JEFFREY - Et toi, si j'ai bien entendu, c'est Sven ?
A son nom, le brun se tourna vers lui calmement. Peut-être pourraient-ils devenir amis... Après tout, il ne connaissait encore pas grand chose, voir quasiment rien du monde des sorciers. Avoir un ami l'aiderait à s'intégrer. Et pour une fois qu'il pouvait profiter d'une présence autre que celle de son frère, son père ou encore Jane... Il avait la nausée. Autour de lui, partout, des garçons et des filles comme lui. Des sorciers. Il n'était pas un cas à part, il n'était pas un monstre.
SVEN - Tu as bien entendu. Lâcha t'il en essayant de prendre un ton amical.
JEFFREY - Parfait alors...
A la fin du repas, lorsque Sven se retrouva seul dans la salle de bain, il décrocha la chaine qu'il portait depuis sa plus tendre enfance autour de son cou. L'argent brilla sous la lumière artificielle, décrochant un dernier éclat comme un avertissement à son porteur. Une petite croix pendait, fragile, suppliante. Il jeta le tout dans la cuvette des WC et tira la chasse d'eau sans même cligner des yeux. Il venait de faire un choix. Dieu l'avait abandonné dès la naissance. Mais la Magie, elle, perdurerait jusqu'à sa mort.

Souvenir n°2
Un an plus tard, 3 janvier ; aux alentours de 21h

Sven lisait, confortablement installé sur le ventre, sur un lit recouvert d'un drap vert émeraude. Il avait toujours aimé le vert. Il était bien content d'avoir été envoyé à Serpentard, d'autant plus que le Choixpeau ne s'était pas trompé, c'était la maison idéale. En un an, il avait eu le temps de s'adapter à la perfection. Serdaigle ne lui aurait pas convenu, malgré sa folie du travail, il avait trop d'ambition. Gryffondor non plus, car voler au secour des malheureux n'était pas sa plus grande passion. Quand aux Poufsouffles... mieux valait ne pas en parler. Non Serpentard c'était parfait. A présent il était plongé dans un livre de runes et lisait avec avidité. Sa soif de savoir était sans égale et tout le monde le savait dans son entourage. Il était le meilleur. Il se demanda un instant si son père aurait été fier de lui d'apprendre ça. Son fils meilleur en sorcellerie qu'en mathématiques. Pitoyable.
Jeffrey apparut brusquement dans la chambre et bondit sur le lit, le faisant un peu rebondir alors qu'il s'installait à côté de lui avec un large sourire mutin. Il attendit quelques minutes en silence, puis voyant que le suédois restait sans réaction, il murmura malicieusement :
JEFFREY - Tu m'as caché des choses.... ?
Le brun soupira et accepta par bonté de coeur de décrocher son regard du livre pour le poser sur son camarade.
SVEN - Qu'as-tu entendu ?
Cette question suffit au bonheur de son ami, dont le sourire s'élargit encore davantage. A croire que son visage allait se fendre en deux. Il adorait les rumeurs, et encore plus si elles étaient fondées.
JEFFREY - La petite troisième année... tu sais... comment elle s'appelle déjà... Victoire ?
SVEN - Elle s'appelle Victoria.
Jeffrey leva un instant les yeux au ciel.
JEFFREY - Ah oui, Victoria. Enfin après, Victoire, Victoria, c'est pareil hin.
SVEN - Pas exactement non. Souviens toi de ce premier année à la rentrée qui t'a appellé Geoffroy au lieu de Jeffrey, tout le monde a cru que tu allais l'emmener dans les cachots pour le torturer...
La réplique tira à son interlocuteur une grimace mi figue mi raisin.
JEFFREY - Moui... Bon... Tu essayes de détourner le sujet là. T'as rien à me dire alors, à propos de Victoria ?... Tu sors avec elle ?... Vous avez dansé tous les deux au bal de noël... Mais moi je ne vous ai même pas vu !
SVEN - C'est parce que tu avais trop bu. Tu n'étais plus en état de voir quoique ce soit à part la bouteille de champagne que tu avais monopolisé pour toi tout seul.
Décidement... Le blond se passa une main sur le visage, se frottant les yeux avec un air mélodramatique avant de reprendre :
JEFFREY - Tu sors avec elle ou pas ? Tout le monde pense que oui...
Il ne sortait pas avec elle, malheureusement. Il avait refusé ses avances au moins quatre ou cinq fois, si ses souvenirs étaient exacts. Elle ne l'attirait pas. Elle était mignonne, mais il n'avait pas envie de s'encombrer d'une fille pour le moment... Depuis qu'il avait découvert qu'il était veela et toutes les conséquences que cela risquait d'impliquer sur sa vie sentimentale, il se refusait à toute promesse amoureuse. Coucher ne l'affectait pas. Sortir avec en revanche signifiait éprouver des sentiments et il s'y refusait. Il se doutait bien qu'un jour, il rencontrerait LA fille qui le rendrait complètement fou, mais pour le moment ce n'était pas le cas et il en était bien content. Alors en attendant de se donner corps et âme d'une manière tout sauf raisonnable à une seule et unique personne, il profitait des étreintes charnelles sans lendemain et les savourais comme si chaque nuit était la dernière.
SVEN - Penses ce que tu veux, je m'en branle.
Les lèvres de Jeffrey formèrent un O silencieux, incapable d'exprimer sa surprise autrement.
JEFFREY - Pour un génie, tu es parfois d'une telle vulgarité... C'est affligeant.
SVEN - C'est clair que toi à côté, tu es carrément un mec recommandable. Siffla le brun, ironique.
Tout le monde savait que Jeffrey n'était en rien un mec recommandable. Il était même assez connu pour son mauvais caractère, et ceux qui avaient la chance d'être considérés comme des amis se comptaient sur les doigts d'une seule main. Un peu comme Sven... Mais sa réputation à lui ne tenait qu'à cause de ses fréquentations. Le suédois l'aimait bien car il le rendait plus fort. Il n'avait plus peur d'être violent, cruel, froid, détestable. Il pouvait se déchainer, laisser libre cours à la haine qu'il avait entretenu durant des années. Jeffrey l'y aidait, il le libérait. Et il lui rendait parfois les coups, l'obligeant à devenir plus dur encore... A se forger une muraille qui était chaque jour plus épaisse et solide. C'était ce qu'il s'était promis, et il éprouvait une joie malsaine et profonde a enfin pouvoir y parvenir. Il allait battre son frère, son maudit frère. Il allait le destituer, le détrôner, l'humilier. Son père le respecterait enfin... peut-être. Rien n'était moins sur de ce côté là.
JEFFREY - C'est clair ouai. Aller je te laisse Casper, oublie pas de manger t'es de plus en plus blanc, on va finir par te confondre avec les chiottes.
SVEN - Casse toi connard.
Sur ce bel échange d'amitié, l'enquiquineur se redressa et laissa le brun finir de lire son livre. Sven se retrouva à nouveau seul dans le dortoir, et il referma doucement l'ouvrage, pensif. Il n'était encore pas rentré chez lui pour les vacances. Il ne rentrait jamais, à part pour les vacances d'été où là, il était obligé. Il ne savait pas exactement avec quel sentiment il se devait de réagir face à cette perte soudaine de tout contact... De la joie de ne plus voir ce manoir si détesté ? Ou de la tristesse ? D'ordinaire, c'était de la tristesse qu'on ressentait... Quand on ne voyait pas sa famille durant presque 1 an... On était triste oui. Mais pas lui. En réalité, il était vide. Totalement vide. Et cette sensation lui faisait un bien fou.

Souvenir n°3
Bal de noël, cinquième année.

JEFFREY - Viens, on va chercher à boire.
Sven soupira. Il n'avait pas spécialement envie de se lever de sa chaise pour traverser la foule... Tout ça pour aller chercher un rafraichissement à sa cavalière. Enfin, si Jeffrey lui disait ça, c'était sans doute parce qu'il avait envie d'être seul avec lui pour pouvoir lui parler de Jessica sans qu'elle ne les entende, justement. Il prit donc sur lui et se mit sur ses pieds, essayant de se motiver.
Jeffrey se dirigea vers la piste, la contournant par la droite tandis que le suédois lui emboitait le pas. Le regard de ce dernier ne tarda pas à se poser sur une silhouette qu'il avait déjà eu l'occasion de contempler depuis un certain temps déjà. Le gryffondor dansait, les mains posées sur les hanches d'un autre garçon. Comment pouvait-il supporter de se montrer ainsi en public ? Sven réprima un frisson jusqu'à ce qu'il se rende compte qu'ils allaient être obligés de passer juste à côté du duo pour accéder au buffet. Il jura intérieurement. Voir Khalen lui descendait le moral encore plus bas que terre... Il l'avait rencontré via Jeffrey, qui ne cessait de raconter à qui voulait bien l'entendre que le rouge et or était une vraie tapette. La première fois qu'il l'avait vu, c'était lors d'une altercation avec son meilleur ami qui s'était amusé à déverser un flot d'insultes homophobes particulièrement variées à l'égard de Khal. Il avait suffit d'un regard pour que les pensées de Sven soient envahies chaque jour qui avait suivit, par le visage de cet abruti. Bordel. C'était étrange comme le destin se jouait de lui, parfois. En étant à moitié veela, il s'était toujours attendu à tomber amoureux d'une fille, ils se marrieraient et auraient beaucoup d'enfants. Une fille jolie, qui plus est. Mais tomber amoureux d'un garçon n'avait jamais été dans son programme. Le soucis, c'est que comme de bien nombreuses victimes de l'amour, il n'avait pas eu le choix.
JEFFREY - Pédales. Entendit-il siffler son compagnon vert et argent alors qu'ils passaient à hauteur du couple.
Sven eut un petit rire nerveux. Il s'estimait déjà heureux que Jeffrey ne soit pas au courant de ce léger soucis sentimental qui le faisait totalement débloqué, ces derniers temps. Sven cachait ses émotions mieux qu'il ne le pensait...
KHALEN - Puceaux. Répondit le Gryffondor, du tac au tac, et Sven se raidit un peu.
Jeffrey finit par attraper un verre de champagne pour lui et Jessica et décrocha un sourire colgate à son ami.
JEFFREY - Je pars devant, ça fait plus romantique (a) Déclara t'il d'une manière théâtrale alors que déjà, il s'éloignait, laissant Sven seul au buffet.
Ce dernier se servit un petit gâteau et le grignota sans réel appétit avant de se tourner vers la piste de danse. Il n'avait pas très envie de danser pour le moment. En fait, il aurait voulu retourner dans sa chambre et y rester enfermer. Mais cela n'aurait pas été une preuve d'une grande sociabilité, aussi faisait-il un effort pour rester le plus longtemps possible présent.
Son coeur ralentit soudain ses battements lorsqu'il aperçut Khalen qui se détâchait de son partenaire pour venir d'un pas décidé dans sa direction. Oulala, ça ne sentait pas bon du tout ça. Sven se força à garder un visage impassible, faisant taire les grondements de son estomac qui réagissait toujours horriblement mal lorsque le Gryffondor était non loin.
Une fois à sa hauteur, ils se fixèrent. Le Serpentard s'obligea à ne pas regarder ses lèvres, plongeant son regard dans le sien. Les secondes semblèrent s'écouler indéfinniment, jusqu'à ce que...
KHALEN - Dis donc elle te va bien cette tenue, Lindqvist. Lança t'il naturellement avant de se mordiller la lèvre inférieure d'un air aguicheur.
La réaction fut immédiate. Sven rougit et fronça les sourcils. Si ça n'avait pas été Khal... Il l'aurait insulté... Mais l'organe vital qui se planquait lâchement dans sa poitrine était trop heureux pour qu'il songe ne serait-ce qu'un instant à s'énerver... Il rejetait ce sentiment de toutes ses forces mais s'il avait réellement pu l'expulser de son corps, il l'aurait fait depuis longtemps. Il était piégé, face au regard bleu ciel qui l'englobait. Bon sang. Il réprima un sourire mauvais. Khal semblait satisfait du résultat de sa démarche. Et si... il était au courant ? Sven sentit soudain un frisson d'angoisse lui parcourir l'échine. Le pire scénario possible à ses yeux était sans nul doute celui là. Que le Gryffondor comprenne... Parce que s'il comprenait, alors le Suédois était fichu. Il avait déjà suffisament honte d'être amoureux d'un mec, pour sa propre sécurité, il désirait plus que tout que cette attirance reste à sens unique. C'était mieux. Tellement mieux...
Le Gryffondor s'éloigna après avoir constaté dans quelle gène il venait de plonger le Serpentard, et Sven se retrouva avec ses pensées noires. Si Khalen était au courant... Se fichait-il de lui ? Jouait-il ? Ce n'était pourtant pas drôle du tout. C'était même un sujet très grave pour le brun. Tomber amoureux était une chose. Tomber amoureux d'un garçon, en revanche, ce n'était pas normal. Il ne pourrait jamais supporter ça.
Un élan de colère monta en lui alors qu'il se redressait, rattrapant le rouge et or avant qu'il ne rejoigne son compagnon.
SVEN - Ça t'amuse ? Je suis pas Jeffrey moi alors ne me force pas à te détester. Lâcha t'il d'une voix où perçait son énervement.
Khalen se retourna vers lui. Le Suédois se noya dans ses prunelles et y perdit son souffle.
KHALEN - Tu n'es pas lui, mais vous êtes toujours ensemble à rire de vos insultes homophobes, alors si tu me détestes pas, tu fais bien semblant... Répondit-il sans se rendre compte de l'effet dévastateur qu'il produisait sur son interlocteur.
Sven ne sentait plus son coeur. Mais il ne pouvait pas cèder... Il analysa la réponse du Gryffondor et son visage perdit le peu de couleur qu'il avait encore. Apparement, il n'était pas au courant. Mais il avait failli l'être, parce que Sven n'avait pas garder le contrôle... Quel idiot ! Quel idiot !
SVEN - C'est ça oui... Il était soudain redevenu très calme, voir presque timide. Il avait faillit faire une erreur monumentale...
KHALEN - tu n'as pas l'air sur de toi. C'est parce que Jeffrey n'est pas là ?
Pourquoi fallait-il toujours qu'il soit rattaché à Jeffrey ? Khalen ne le connaissait pas... Il ne savait pas à quelle point la force du Serpentard l'aidait à tenir année après année.
Il eut un rire moqueur et son regard brilla d'une lueur de soulagement.
SVEN - Comme d'habitude Khalen, tu es complètement à côté de la plaque...
Sur ces mots, il se retourna et laissa ses jambes l'entrainer le plus loin possible de celui qui, en l'espace de quelques minutes, avait réussi une nouvelle fois à foutre un bordel monstre dans son esprit. Il rageait qu'un mec tel que le septième année possède autant de pouvoir sur lui, sans même s'en apercevoir... Finalement, passer la soirée enfermée dans sa chambre n'était pas une si mauvaise idée.

Souvenir n°4
1 ans plus tard, un samedi après midi du mois d'avril

Finnigan avait vieilli. En 6 ans, des rides avaient cruellement creusé son visage. Sven observaient ces dernières avec un discret sourire en coin. Il savait qu'il s'était trouvé une amante, il en avait discuté avec Rafaël. Mais ce n'était pas pour parler de ça qu'il était précipitament rentré chez lui, après avoir reçu une lettre la veille. Son père n'était pas le seul dans la pièce. Une jeune fille se tenait en retrait derrière lui. Le regard baissé, elle avait les joues roses et du fard à paupières qui mettait en valeur le bleu de ses yeux en amandes.
FINNIGAN - Tu connais déjà Ruby Valmer.
RUBY - Bonjour. Lança t'elle d'une petite voix timide alors qu'elle s'avançait d'un pas.
Sven nota qu'elle avait fait des efforts pour ce grand jour... Elle avait enfilé une robe noire et rouge qui serrait gracieusement sa taille. Elle était fine, élancée. Le genre de fille sur laquelle il se serait sans doute retourner à Poudlard, en allant ensuite lui proposer de passer la soirée ensemble.
SVEN - Salut. Lâcha t'il froidement.
Son père le fusilla du regard, mais à présent cela ne faisait plus aucun effet au Serpentard. D'autant plus qu'actuellement, il bouillonnait d'une colère glaciale. Ruby était une moldue qui ne connaissait rien au monde des sorciers. Son père lui avait raconté qu'il faisait des études en langues étrangères, très loin. Des tissus de mensonges... S'il pouvait accepter que son fils étudie la magie, il ne supportait pas de le faire savoir aux autres. Il en avait honte.
La jeune fille avait été une amie d'enfance lorsqu'il avait du temps libre. Elle avait connu également son frère, et si à l'époque elle semblait montrer une préférence pour celui ci, à présent ses préférences n'importaient guère... puisque leurs familles respectives avaient décidé de les fiancer.
FINNIGAN - Je vous laisse seuls, vous devez discuter à présent.
Le père de Sven s'éclipsa et un silence pesant tomba entre les deux jeunes gens. Le Serpentard alla s'installé sur le fauteuil. Il était mal à l'aise, dans ce bureau, avec ce sol recouvert de moquette... Ce fut finalement Ruby qui le tira de ses pensées :
RUBY - Ton père m'a dit que tu n'étais pas très heureux de devoir m'épouser...
Sven posa sur elle un regard blasé.
SVEN - Pourquoi ? Toi tu l'es ?
RUBY - Je... ne sais pas encore. Je pense que je pourrais tomber amoureuse de toi, et toi de moi si on s'en donne la peine tu ne crois pas ? Pour le bien de nos deux familles...
Il ne pouvait décemment pas lui dire qu'il était totalement incapable de tomber amoureux d'elle, pour la simple bonne raison qu'il était un veela et qu'il connaissait déjà la personne a qui son coeur appartenait. Et elle portait le nom de Khalen. Il fallait donc qu'il trouve autre chose. C'est le moment idéal pour tout faire foirer. Saisis ta chance.
SVEN - Je te trouve très triste comme fille, Ruby. Tu es aussi excitante que le dernier épisode d'Inspecteur Derick. Non pas que je regarde cette série merdique... mais enfin, je suis tombé dessus une fois par hasard dessus et je me suis endormi, je suppose que ça voulait signifier quelque chose. Tu vas te marier à un mec que tu vas essayer d'aimer ? Sérieusement ? Et bien moi je ne t'aime pas, et je suis incapable de t'aimer. Tu ne m'excites pas, malheureusement. Mais je vais faire des efforts, je te promets de ne pas te frapper et de ramener de l'argent au foyer. Et je te promets de divorcer dès que j'en aurais la possibilité.
Il la vit écarquiller les yeux, ses lèvres charnues et pulpeuses s'entreouvrant de surprise. Il continua :
SVEN - Bien sur pour le divorce, on sera pas obligé de dire qu'on s'aime pas, on pourra inventer une excuse bidon pour que tes parents t'en veulent pas, je sais pas moi, pourquoi pas que j'ai le sida ou la malaria ? Ou bien que je t'ai trompé ? Chose qui risque fort d'arriver d'ailleurs alors je te conseille de t'y préparer.
Il fut stoppé par la giffle qu'elle venait de lui asséner. Sa joue le brûla.
RUBY - Tu as raison tu sais. Je ne t'aime pas. Et à présent je préfère rouler une pelle à un cheval mort plutôt que de t'adresser la parole. Merci de m'avoir aidé à ouvrir les yeux. Tout est plus clair maintenant.
Elle se détourna de lui pour quitter la pièce, et au dernier moment, elle ajouta sans se retourner :
RUBY - Et je te souhaite de ne jamais être aimé.
SVEN - C'est ça. Dépèche toi d'aller rouler une pelle à un cheval mort, tu me diras comment c'était.
Sven eut un sourire mauvais alors que la porte se refermait avec violence derrière elle, le laissant seul avec lui même comme seul auditoir.
Moi aussi, je ne souhaite à personne de m'aimer, parce que je le détruirais. Parce que de toute manière, il détruisait toujours tout.


Un jour je serais cannibale.



Souvenir n°1
5 ans après tout ça...

Sven poussa un petit soupir désabusé. Il n'aurait jamais cru se retrouver un jour ici, derrière cette longue table garnie de nourriture. A sa droite se tenait la professeur de botanique. A sa gauche le prof de vol sur balai. Et lui... il tenait désormais le poste d'Astronomie. Il était de retour à Poudlard, quatre ans à peine après avoir obtenu son diplôme. Il ne savait pas exactement ce qu'il fichait là, tandis qu'il y réfléchissait. Quand il avait quitté Poudlard, il s'était dit que ses années de liberté se finissaient irrémédiablement et qu'il avait essayé d'en profiter un maximum... Mais que le moment était revenu de rentrer à la "maison". Maison : ce mot avait pris un tout autre sens, durant ses 7 ans d'études, et il n'était plus vraiment certain de pouvoir considérer le manoir comme tel... Mais une fois qu'il était retourné sous l'oppressante présence de son père, il avait réalisé qu'il ne pourrait jamais oublié. La magie représentait ce qu'il y avait de meilleur dans sa vie. Devait-il s'arrêter maintenant juste parce que Finnigan le lui ordonnait ? Hors de question. Il avait donc postulé durant 2 années d'affilées au poste d'astronomie. Il avait choisit cette matière car c'est celle là qu'il préférait, et au moins, être prof d'astronomie ne choquerait pas trop sa famille. Ce n'était pas comme s'il annonçait vouloir devenir prof de métamorphose ou prof de vol sur balai. Astronomie, c'était parfait. Il ne fut accepté qu'à son second essai. Et maintenant il était là. Comme un con. Songea-t'il intérieurement alors qu'il portait à ses lèvres un verre de vin rouge qui le fit grimacer. Il se rappela du dernier échange qu'il avait eu avec Rafaël, un mois plus tôt. Ce dernier partait pour son premier voyage d'affaire à Bangkok. Du point de vue de leur père, il était celui qui s'en était le mieux sortit...
RAFAEL - Professeur d'astronomie ? C'est surprenant, j'aurais jamais cru que tu deviendrais prof. T'as jamais été fait pour ça.
SVEN - Si tu le dis..
RAFAEL - Et bien, bonne chance alors.
SVEN - Toi aussi.
Il fit tourner la bague qu'il avait autour du doigt. Il était toujours fiancé à Ruby, malgré tous ses efforts pour y mettre un terme, son père s'accrochait aux fiançailles comme un chien à un os à moëlle. Comme un ultime pied de nez à la femme qui l'avait manipulé, il enfermait son fils dans une relation amoureuse inexistante. C'était bien trouvé de sa part... Sven avait fini par lâcher l'affaire, à ce sujet. Tout le monde finirait bien un jour par se lasser de ce petit jeu. Ruby était au final la seule à en souffrir et ça lui était bien égal. De toute manière il se moquait de tout. Au fil des années, il avait acquis un manque d'optimisme à toute épreuve et une sociabilité réduite à son stricte minimum. Fallait-il donc s'étonner qu'à présent il soit seul ? Enfin, seul n'était pas vraiment le mot. Il avait des filles à temps partiel et ça lui convenait bien comme ça. Pas d'attachement, pas de soucis à se faire. Il n'avait pas besoin de se poser la question de quoi acheter pour la St Valentin, ou bien dans quel resto aller. Le plaisir qu'il tirait de ces nuits là présentait un avantage : contrairement au bonheur, il avait le mérite d'exister.
D - Veuillez accueillir notre nouveau professeur d'astronomie, Mr Lindqvist.
Sven se leva et accrocha un petit sourire engageant sur ses lèvres, observant les élèves qui le dévisagaient. Je les ai regardé, ils m'ont regardé. Bref, on s'est regardé.