Sven ne savait pas exactement comment réagir. Rien que de penser à ce que Khal avait fait la veille lui faisait serrer les poings pour éviter de frapper les murs ou le visage de cet abruti. Il ne savait pas vraiment s’il voulait des explications ou juste des excuses. Des excuses déjà, ça aurait été pas mal. Il avait trop bu hier soir ou quoi ? C’était insupportable. Ses veines étaient en feu. Mélange de désir et de colère. Il se sentait fébrile et fiévreux. Depuis qu’il avait vu l’ancien Gryffondor pour la première fois, des années plus tôt, il se demandait pourquoi. Pourquoi lui ? Pourquoi avait-il fallu que ça tombe sur Khal ? C’était bien le pire… Un mec. Comme si le destin se foutait de sa gueule. Il avait tout fait pour qu’il ne découvre rien, mais l’incident de la veille l’inquiétait. Et si Khal avait deviné son attirance ? S’il avait trouvé un indice ? Alors Sven était fichu. Il ne pourrait pas lutter éternellement contre sa maudite malédiction. Tout son corps réclamait constamment le contact de Khalen, et c’était un vrai calvaire de se battre contre ses propres pulsions. Alors si en plus de ça, le professeur de soins aux créatures magiques en rajoutait une couche en appuyant juste là où ça faisait mal… Il ne devait pas savoir. Jamais. Sven devait brouiller les pistes et tout faire pour préserver les apparences.
Il avait observé Khalen de loin toute la journée, attendant un geste, un signe. Quelque chose qui voulait dire que le professeur souhaitait s’excuser. Mais rien. Et plus les heures passaient, plus le brun enrageait. Il ne laisserait pas Khal s’en sortir, il voulait des excuses bordel ! Il tremblait, rien que de repenser à ce baiser. Il avait des frissons jusqu’en bas des reins et la bouche pâteuse comme un lendemain de cuite. Si Khal ne se décidait pas à venir s’excuser, alors c’est Sven qui irait vers lui pour lui demander de le faire. Tant pis. C’était un lâche. Un crétin.
Lorsqu’il fut de retour dans ses appartements après le repas du soir,  il laissa échapper un juron et donna un violent coup de pieds dans un vase avant de tout nettoyer d’un coup de baguette. Inspirer, expirer. Ne pas se laisser avoir. Il se foutait de sa gueule, il jouait avec lui. Il ne comprenait pas l’impact de ses lèvres sur les siennes, et c’était tout à fait normal. Il était toujours ce gamin rouge et or impulsif et je m’en foutiste. Cette plaie de Gryffondor inutile et désappointante. Et bien Sven allait lui dire deux mots, à ce connard. Sortant de sa chambre, il longea les couloirs pour arriver aux appartements de Khalen et toqua avec violence.
Lorsque la porte s’ouvrit, il fusilla du regard l’intéressé avant de lâcher froidement : « Franchement Khal je me fous de savoir pourquoi t’as fait ça hier soir, t’étais peut-être bourré ou je sais pas, mais je veux des excuses c’est tout. »
Ça au moins c’était clair non ?

J’avais beau relire inlassablement le parchemin, je ne savais toujours pas quoi en penser. Partagé entre la douleur et l’amertume à l’idée de la voir ainsi profiter d’un instant de faiblesse pour revenir sur des voeux que j’avais prononcé des années auparavant, bien avant que ma vie ne parte en morceaux. Qu’étais-je censé faire à présent ? Deux ans jour pour jour après la mort de Teagan, je ne m’attendais pas à recevoir une telle missive provenant de sa soeur aînée. Malgré toute l’affection que j’avais pour elle, je ne comprenais pas pourquoi elle ne m’avait pas dit dans ses précédentes correspondances qu’elle était malade, au point de me demander - le pire jour de l’année qui plus est - si j’acceptais de prendre mes responsabilités de parrain et d’accueillir à Poudlard - afin de garder un oeil sur lui - son fils que je n’avais pas vu depuis la mort de mon compagnon. Autant dire que je tombais de haut. Loin de moi l’idée de renier le choix que j’avais fait lorsque j’avais accepté de devenir plus qu’un simple oncle par alliance pour cet enfant sans père, qui passait son temps à nous suivre partout quand nous nous occupions des dragons de l’élevage. Mais étais-je réellement capable de veiller sur lui, comme nous le faisions autrefois ? De son côté, il n’avait peut-être pas envie de me revoir, après deux ans d’absence. Mais je n’eus pas le loisir d’y songer davantage, puisqu’un invité surprise vint frapper à ma porte.

Sortant quelque peu de ma léthargie, je me levai pour ouvrir la porte, persuadé qu’il s’agissait de Merry qui venait m’inviter à passer une soirée entre amis, afin de me changer les idées. Mais derrière la porte, ce n’était pas un regard amical qui me toisait sans ménagement... Sven braquait ses prunelles ambrées sur moi, comme s’il m’accusait d’un crime quelconque, alors que je ne l’avais pas approché depuis plusieurs jours. « Franchement Khal je me fous de savoir pourquoi t’as fait ça hier soir, t’étais peut-être bourré ou je sais pas, mais je veux des excuses c’est tout. » Bon sang, mais de quoi parlait-il ? Certes, j’avais bu hier soir, mais je n’étais pas à Poudlard et encore moins en sa compagnie... Jamais je n’aurais passé la soirée avec un mec que j’avais désiré pendant toute ma scolarité et qui m’attirait encore, alors que toutes mes pensées étaient tournées vers Teagan.

Incrédule, je le dévisageai sans comprendre un traître mot de ce qu’il me reprochait exactement. « Par Merlin, Sven, mais de quoi tu parles ?! » La surprise fit doucement place à une certaine irritation. Las de ses accusations infondées, je soupirai avant de glisser mes doigts dans mes cheveux. « Qu’est-ce que tu me reproches au juste ? » Instinctivement, je roulai le parchemin entre mes doigts, comme pour évacuer la tension qui s’emparait de mon corps. Pour être honnête, je n’avais pas très envie de lui parler de ma vie privée, en plus d’être persuadé qu’il n’en avait vraiment rien à foutre, mais puisqu’il semblait persuadé que je lui avais fait quelque chose, autant défendre un peu ma cause. Parce que je n’étais pas vraiment d’humeur à mener ce genre de joute. J’étais épuisé et meurtri par une nuit de cauchemar et de tristesse... Sans compter le courrier que je venais de recevoir et qui me plaçait dans mon nouveau rôle de tuteur. « Écoute, quelle que soit la raison de ta colère, je ne peux pas être le coupable... Tu te trompes de cible. Et si tu ne me crois pas, sache que je n’étais pas dans le château hier soir... J’avais rendez-vous à Pré-au-lard et je suis rentré à l’aube ce matin... » Toute cette histoire ne le regardait pas, mais puisqu’il tenait tant à m’accuser, il ne m'avait pas laissé le choix... Appuyé contre l’embrasure de la porte, je lui fis signe d’entrer. Autant ne pas étaler nos vies privées dans un lieu où tout le monde pouvait nous voir et nous entendre.


HJ - Désolée pour le retard aux deux RPs, j'ai eu pas mal de soucis pour me remettre dans le bain...