La temps était à son image : maussade, pluvieux, misérable. La demoiselle avait le cœur en miette, le désespoir venait de planter sa graine dans son esprit, elle qui avait toujours réponse à tout, elle qui savait toujours se sortir des situations les plus ennuyeuses avait perdu la foi. Elle ne savait que faire, elle ne savait pas où elle irait, ce qui se passerait, pour la première fois de sa vie, Ange doutait vraiment. Sa vie n’avait jamais été toute rose, mais depuis toute petite la demoiselle parvenait à s’en sortir, à tourner la situation à son avantage, mais cette fois-ci elle ne trouvait pas d’échappatoire, pas de sortie de secoure. L’espoir était parti, il s’était envolé et la jeune femme ne s’en sentait que plus déprimée encore. La pluie lui rappelait son humeur, les nuages lui rappelaient celui qu’elle avait dans le cerveau, son esprit étant tout embrouillé depuis la grande révélation. Elle avait toujours cru que sa belle-mère plaisantait, qu’elle ferait tout pour chasser Ange loin de sa demeure. Mais non, elle voulait jusqu’au bout lui pourrir la vie, jusqu’au point de venir hanter le reste de sa vie. L’ultime chance d’Ange d’échapper à sa famille, à tous ces gens venait de s’envoler. Elle qui avait toujours cru qu’elle aurait son mot à dire sur celui qui la prendrait pour épouser, qu’elle aurait le droit de choisir à qui confier son cœur. Mais non. Cela aurait été trop beau, un rêve qui venait de s’envoler. Le fiancé était maintenant connu et l’identité de ce dernier répugnait encore plus la jeune femme, elle ne l’avait jamais apprécié, même si elle ne le connaissait pas personnellement, elle en savait suffisamment sur son compte pour savoir qu’il n’était pas celui qui lui convenait, qu’il la privait de son bonheur. Le cœur de la jeune femme se serra dans sa poitrine à nouveau à cette pensée. Rohàn Lestrange. Rien que ce nom lui donnait des frissons de dégout. Elle ne supportait pas cette famille, ces gens. Eux qui se pensaient meilleurs que les autres à cause de la pureté de leur sang et de leur nom connu dans le monde des sorciers. Non décidemment le sort continuait de s’acharner, ils n’étaient vraiment pas faits pour être ensemble et pourtant elle n’avait pas le choix. Elle ne pouvait pas fuir car elle finirait par être retrouvée, elle ne pouvait abandonner ses études et s’enfuir, elle n’avait pas ce courage.

Ses pas s’enfoncèrent dans la boue. Elle espérait passer inaperçu à Pré-Au-Lard, qu’on ne vienne pas l’embêter. Elle voulait juste boire un verre, se changer les idées, ne surtout pas penser aux dernières nouvelles qui venaient de tomber. Elle se souvenait de la première conversation qu’elle avait eue avec sa belle-mère à ce propos. Elle se souvenait de la façon dont elle avait éclaté de rire, le ton moqueur qu’elle avait pris pour répondre à la marâtre quand cette dernière lui avait annoncé qu’elle cherchait un fiancé pour sa belle-fille. Ange n’y avait pas cru, elle avait toujours dit qu’elle n’y arriverait pas, qu’elle n’aurait pas le temps. Le rêve de la Serdaigle était de partir et elle avait toujours dit qu’elle était persuadée qu’elle aurait concrétisé ce rêve avant que sa belle-mère n’arrive à ses fins. Ange soupira et posa son verre avant de le contempler longuement. Elle n’en revenait pas d’être tombée aussi bas. De ne pas voir le côté positif de tout cela. Mais après tout, où se trouvait-il ? Comment voir un côté positif dans un mariage forcé avec une personne qu’elle détestait de tout son être. Elle savait dores et déjà qu’elle lui pourrirait la vie, c’était une certitude. Elle ferait tout pour qu’il la fuie, pour qu’il perde patience et annule toute cette histoire, car il devait bien avoir son mot à dire dans toute cette affaire non ? Il ne pouvait pas lui aussi être contre cette idée et faire semblant que tout allait bien. Non, c’était impossible. Quelqu’un voulut s’asseoir à ses côtés, encore un mec qui s’était perdu et qui pensait qu’elle allait l’accueillir à bras ouvert, mais le regard glacé que lui jeta Ange persuada l’opportun de dégager. Elle commanda un nouveau verre et se replongea dans ses souvenirs.

Elle aurait voulu qu’il ne pollue pas ses pensées, son esprit et pourtant dès qu’elle se mettait à trop réfléchir, elle voyait le visage de Rohàn bien clairement dans son esprit. Il ne devait pas se souvenir d’elle, de la petite blonde au caractère bien trempé qui le détestait et qui détestait sa sœur encore plus, cette fillette qui refusait de se mélanger aux gens de son espèce comme on disait, ceux au sang pur, les personnes qui méritaient de faire partie de l’élite du monde des sorciers. Ange n’était pas comme ça. Elle n’aimait pas faire des distinction sur des choses aussi futiles que le sang de quelqu’un ou ses origines. Elle était persuadée que seule les actions de quelqu’un le définissaient et jusqu’ici elle pouvait affirmer que son futur époux n’était pas quelqu’un de bien, contrairement à ce que son sang laissait supposer. Elle ne comprenait pas ce qui était passé par la tête de sa belle-mère. Cette dernière devait se douter que toute cette histoire ne plairait pas à Ange et que dès qu’elle en aurait l’occasion, elle ferait tout pour briser ce mariage et s’en aller. Elle ne resterait jamais mariée à un homme qu’elle n’aimait pas et qui ne la respectait pas. Car il fallait bien le souligner, JAMAIS Rohàn ne la respecterait, jamais il ne la verrait pour ce qu’elle est vraiment. Elle avait compris qu’elle n’était qu’un pion sur son échiquier et que d’une façon ou d’une autre les deux familles cherchaient à l’utiliser. À quelles fins, elle n’en avait aucune idée, mais ce genre de mariage ne se faisait pas pour le simple plaisir de voir deux familles s’unir, il y avait toujours des raisons cachées : l’argent, la réputation, …

Elle soupira, c’était peine perdue. Elle devait admettre que cette histoire la pourchasserait jusqu’à ce que le mariage soit prononcé, elle n’arriverait pas à se la sortir de la tête. Elle aurait aimé disparaître, là, maintenant, tout de suite. Partir loin. Elle imagina deux secondes une plage ensoleillée, une île déserte ou rien ni personne ne viendrait jamais la déranger. Mais cette vision paradisiaque fut bien vite chassée de son esprit quand une vision d’horreur se dessina devant elle. La personne qu’elle avait le moins envie de voir en cette journée venait de prendre place face à elle sans même lui demander son avis. Le regard d’Ange se durcit, elle prit cette moue qu’elle avait quand elle était contrariée. Non décidemment, elle aurait mieux fait de rester au lit. « Bonjour, Ange. » Le son de sa voix la fit encore plus rager. « Qu’est-ce que tu me veux ? » Directe, cassante. Elle n’était pas heureuse de le voir et elle le lui ferait bien comprendre. Au diable les formules de politesse et autres entourloupes, elle préférait aller droit au but.

Spoiler:

« Qu’est-ce que tu me veux ? » … Rohàn arborait un parfait sourire faussement chaleureux. Non, le Serpentard ne savait pas être galant, ni même montrer une once de gentillesse à ce qu’il considérait des étrangers. Mieux ne valait même pas parler des indésirables. Mais ce qu’il pensait à ce moment à s’égarait complètement de cette gentillesse arborée. Là, il avait envie de prendre la tignasse de la blondasse et fracasser sa tête contre la vitre du bar des Trois Balais, dans l’infime espoir qu’elle meure sur le coup. Certes, il serait envoyé à Azkaban mais il aurait la conscience tranquille. Et accessoirement, ce serait une pétasse de moins sur cette planète.

« Ecoute, je peux comprendre qu’en ce moment tu as tes menstruations, mais ce n’est pas parce que tu es en pré-chaleur que tu dois m’agresser … » Rohàn ? Le tact ? Ça fait deux. La douceur et les mots gentils, il ne connaissait pas. Si on se demandait pourquoi l’ainé Lestrange n’avait pas de relations sérieuses, la réponse se présentait maintenant d’elle-même. A l’âge de l’adolescence, toutes les filles, plus ou moins, ressemblaient à Wilhemina Goyle. On croit au prince charmant, aux jolis décors où des papillons mielleux s’y collaient. Mais la réalité était tout autre. Surtout chez le fils Lestrange. Décidant de prendre place en face de la jeune sang-pur, il lui adressa son sourire le plus malsain. « Je veux connaître ce qui va être ma future femme dans quelques mois. « Voilà pourquoi Rohàn avait osé mettre les pieds dans un pub bien trop fréquenté par de la vermine, où les sangs n’hésitaient pas à se mélanger le temps de prendre un chocolat chaud, une Bierraubeurre ou une connerie du genre. S’il ne laissait rien paraître, le septième année savait quelques trucs sur sa fiancée. Déjà, sa belle-mère la haïssait. Il l’avait directement senti dans son ton lorsqu’elle s‘était adressée à lui pour lui parler de sa belle-fille. Cependant, il ne voulait point savoir. Affaires de famille. Il aimait que celles des Lestrange restent secrètes, alors savoir celle des Halley l’insupporterait.

Mais visiblement, Ange ne portait pas le garçon dans son cœur. Pas du tout. Et alors qu’il s’était faussement réjoui de l’annonce du mariage, de son côté, Ange avait dû essuyer des larmes. Cependant, Rohàn n’en prendrait pas compte. Les choses avaient été faites. Les dés étaient jetés. « Tu ne m’aimes pas, je me trompe ? » Ton faussement naïf et craintif mais feutré de curiosité. Bien sûr qu’elle le détestait, ça crevait les yeux. Elle souhaitait peut-être même sa mort afin que le mariage n’ait pas lieu. Or, il y tenait. Quelque part, il se sacrifiait uniquement pour redorer le blason des Lestrange. Il allait donner sa vie entre autre pour un blason qu’il comptait bien perdurer. Les Lestrange avaient encore des décennies à vivre. Ange serait la mère de ses enfants. « Tu es du genre à écouter les rumeurs ? On dit « Ah, Lestrange ! » alors forcément, on y croit. Parce que c’est tellement plus facile d’écouter les rumeurs. Mais tu ne me connais pas Ange ! Tu n’as même pas idée de quel genre de personne je peux être. » Il la mettait en garde. Juste pour qu’elle ne soit pas surprise. Rohàn n’était pas le typique sang-pur acceptant de se marier pour faire bonne impression. Il avait un caractère trempé. Et la Serdaigle possédait aussi un caractère de trempé. Les deux faisaient la paire clairement. Un joli p’tit couple avec des scènes de ménage en perspective.

Spoiler:

« Écoute, je peux comprendre qu’en ce moment tu as tes menstruations, mais ce n’est pas parce que tu es en pré-chaleur que tu dois m’agresser … » Le regard de la demoiselle se fit plus froid encore. Elle ne semblait pas vexée par ses paroles, juste énervée. « Pourquoi devrais-je être gentille avec toi Rohàn ? Pour tes beaux yeux ? Parce que même ça tu ne l’as pas pour toi. » Oui, elle venait d’insinuer qu’il n’était pas à son goût. Elle ne semblait pas plus que lui connaître le mot « tact », surtout avec les gens qui la butaient autant. Elle avait toujours connu cette famille de sorciers, elle-même faisant partie d’une famille au nom respecté et réputé, une famille de sorcier au sang pur et riche du surcroît. Les Lestrange et les Halley s’adoraient, la belle-mère d’Ange du moins adorait cette famille qui représentait son idéal type de famille de sorcier, ce à quoi chaque famille de sorciers devrait ressembler. Ce n’étais pas le cas d’Ange qui abhorrait ces pratiques et ces histoires de pureté du sang. La grandeur d’une personne se définissait par ses actes et non pas par le nom de famille qu’il porte et encore moins par la pureté de son sang. « Je veux connaître ce qui va être ma future femme dans quelques mois. » Elle eut un sourire ironique, presque amusé. « Ne vends pas la peau de l'ours avant de l'avoir tué, je n’ai pas encore la bague au doigt, il est encore temps d’agir. » Signifiant qu’elle ferait tout son possible pour annuler toute cette histoire. De plus, si ce mariage devait réellement avoir lieu, elle préférait passer le moins de temps possible en la compagnie du jeune homme avant le jour j, elle devrait déjà passer assez de temps à son goût à ses côtés dans le futur, elle ne voulait pas devoir le supporter avant, ce serait au dessus de ses forces. « Tu ne vas pas me dire que toute cette histoire te réjouis ? » Elle lui jeta un coup d’œil sceptique, elle ne l’avait jamais pris pour le genre à se marier, encore moins se marier de force avec une fille qu’il n’avait pas choisie. Ce mariage était un échec avant d’avoir lieu, il fallait être aveugle et sourd pour ne pas s’en rendre compte, ces deux-là n’iraient jamais bien ensemble et ne s’entendraient jamais. Ange en tous cas ne ferait aucun effort pour arranger les choses, elle n’était pas une marionnette ou un pion sur l’échiquier géant de sa belle-mère. Elle but une gorgée de sa bière et se dit qu’il en faudrait plusieurs autres pour que cette journée ne laisse pas un goût trop amer. La Serdaigle détourna le regard, essayant d’ignorer celui qui lui faisait face à présent. Le voir là, face à elle, l’énerva encore plus, elle aurait aimé qu’il la laisse tranquille, qu’il lui laisse le temps de digérer cette nouvelle.

« Tu ne m’aimes pas, je me trompe ? » Elle lui sourit de manière assez cynique. C’était l’euphémisme de l’année. Ange et un Lestrange ? Non, bien sûr que non elle ne l’aimait pas. Ni lui, ni sa sœur d’ailleurs, il n’avait pas droit à un traitement de faveur. « Tu es du genre à écouter les rumeurs ? On dit « Ah, Lestrange ! » alors forcément, on y croit. Parce que c’est tellement plus facile d’écouter les rumeurs. Mais tu ne me connais pas Ange ! Tu n’as même pas idée de quel genre de personne je peux être. » Il semblait oublier qu’ils avaient passé leur enfance à se côtoyer, qu’elle avait vu son égo grandir de jour en jour, son air hautain se faire de plus en plus présent, les idées de ses parents et de leurs ancêtres avant eux faire leur chemin dans son esprit. Elle savait exactement de quoi il était capable, mais il ne semblait pas savoir de quoi elle était capable. « Oh, pauvre malheureux, tu vas m’apprendre que tu es quelqu’un de bien, que tu n’attaques personne pour le simple plaisir de le voir se tortiller, que tu ne te crois pas supérieur aux autres tout cela parce que tu t’appelles Lestrange ? Je te rappelle que toutes les soirées mondaines, les brunch et autres réunions de débiles aux égos surdimensionnés auxquelles tu as pu assister, j’étais là aussi. Et tu ne vaux pas mieux que ta sœur, j’en suis persuadée. » Elle avait craché ces paroles, levant quelques peux le tons. Il avait l’art de faire ressortir ce qu’il y avait de pire en elle, tout comme sa sœur. Cette chère Alesya, Ange vint à se demander ce qu’elle pensait de toute cette histoire. Elle ne devait pas voir d’un bon œil que sa pire ennemi soit sur le point de rejoindre les rangs de sa belle famille. « Mais allons-y, parlons, je suis persuadée que nous avons pleins de choses à nous raconter l’un sur l’autre. Enfin toi, en tous cas, car moi je ne sais vraiment pas ce que je pourrais te raconter sur moi, vu qu’apparemment je ne sais rien de toi, mais toi tu connais tout de moi, n’est-ce pas ? » Elle était sarcastique, cynique, son regard froid vint se plonger dans celui du jeune homme. Elle avait hâte de voir ce qu’il avait à répondre à cela, même si elle se maudissait intérieurement pour avoir relancé la conversation plutôt que d'avoir coupé court à celle-ci.