Tu n’as pas pu t’empêcher de laisser échapper quelques larmes alors qu’une nouvelle fois ton hibou est revenu bredouille de sa course matinale. Quelques larmes parce que cela voulait dire qu’une nouvelle fois que Jarod ne t’avait pas envoyé de lettre, qu’il n’avait pas daigné t’adresser un seul piètre mot alors que, non d’un lutin de cornouaille, tu avais porté son enfant ! Le sang de son sang avait grandis au sein même de ta chair et même si l’on te l’avait enlevé et que cela te faisait encore l’effet d’un doloris tu aurais aimé qu’il ne laisse pas tomber la partie si facilement. C’était votre guerre, votre bataille. Il y a encore quelques mois vous rêviez tous deux de ne pas avoir à vous cacher, de renvoyer au placard l’opinion de tous ceux qui pourraient vouloir du mal à votre histoire… Mais au fond, peut-être étais tu la seule à rêver d’un tel avenir. Tu le savais plus combatif, le Jarod que tu connaissais, celui qui faisait battre ton cœur, n’aurait jamais laissé tomber votre amour de la sorte. Il aurait bravé des océans pour toi, il te le disait chaque jour à Salem pour apaiser tes inquiétudes mais aujourd’hui, il ne tentait même pas de franchir l’océan qui vous séparait… Tu ne voulais pas le croire mais au fond… Tu entendais d’ici les paroles acerbes de ton cher frère te répétant sans cesse que ni Jarod ni son fils que tu portais n’auraient plus qu’un sentiment de honte à ton égard, toi, sale née moldue aux yeux de tous ces sangs purs de malheur. Encore une fois tu allais tout de même tenter une nouvelle approche. Envoyer une nouvelle lettre, pour répéter encore et encore que tu as l’impression de ne plus vivre éloignée d’eux deux et que tu n’avais pas qu’une envie, de te blottir entre ces bras en berçant votre enfant.

Tu venais à peine de laisser partir ton oiseau lorsque sonna l’heure du départ pour Pré Au Lard. Tu n’avais pas particulièrement envie d’y aller mais au fond cela ne pouvait que te faire du bien de quitter au moins pour quelques heures l’école. Tu n’avais jamais particulièrement apprécié  Poudlard mais rien ne s’arrangeait alors que les problèmes s’engrangeaient au milieu du château, entre l’attaque d’Halloween, l’explosion de la tour des Serdaigle dont j’apercevais encore les décombres en levant les yeux vers le ciel et la soit disant apparition d’une force semblable aux mangemorts… Rien de bon en somme. Mais il fallait aussi que tu avoues que tu étais inquiète de ce qu’il pourrait t’arriver en dehors de l’enceinte protectrice du domaine et que tu redoutais désormais de te retrouver seule dans les rues du village sorcier. Alors tu te pressas à rejoindre le reste du groupe, retrouvant avec soulagement tes camarades de Poufsouffle, de jeunes filles de ta maison qui t’avaient prises sous leur aile attendries par tes petits airs tristes. Tu leur en étais reconnaissante même si, jamais elles ne pourraient vraiment te comprendre. Et puis tu n’avais pas la tête à faire la discussion aujourd’hui alors tu te contentais de les écouter discuter gaiement. Au fond, cela faisait du bien de côtoyer ces petits soleils. Cela te permettait de mettre de lumière dans ce monde pluvieux. L’après-midi passa plutôt agréablement à ta plus grande surprise et l’heure était déjà bien avancée lorsque tu faussas compagnie à tes camarades pour aller acheter quelques friandises à envoyer à ton frère. Malgré tout ce que tu pouvais dire sur lui tu l’aimais plus que tout et c’était le seul lien que tu avais avec l’Amérique, alors tant pis tu mettais le peu de fierté qu’il te restait et ta colère de côté et prenais régulièrement des nouvelles de lui et de vos monstres de parents. Ces gens qui avaient réussis à te dégouter définitivement des moldus et te faisant aller à l’encontre de ce que tu étais pour oublier que tu étais plus proche d’eux que tu ne le voudrais.

Les bras chargés de paquets de bonbons que tu rangeas consciencieusement dans tes poches pour rejoindre le groupe non loin des trois balais tu ne pus t’empêcher de frissonner doucement. Une nouvelle fois tu te retrouvais seule au beau milieu du village. Et il te semblait même que quelqu’un te suivait dans l’ombre… Surement un simple effet de ton imagination. Tu n’avais pas à t’inquiéter de ça lorsque tu étais en Amérique… Jarod te protégeait de loin partout où tu allais, il ne laissait personne te faire du mal. Encore une fois, tu ne pouvais t’empêcher de te dire que tu ne pouvais pas vivre sans lui. Accélérant le pas jusqu’au bar tu baisses la tête pour ne pas croiser le regard des sorciers que tu ne connaissais pas. On n’était jamais trop prudents. Mais tu ne te doutais pas que tout ce à quoi tu tenais à échapper se trouvait à l’entrée des trois balais. Une bagarre, cela arrivait de plus en plus souvent et tu détestais ça… Surtout à l’idée que quelqu’un que tu puisses connaitre soit impliqué. Et à la vue du visage ensanglanté de Lucifer, que tu connaissais plus que bien tu ne pus t’empêcher de laisser échapper un petit cri de panique. Ce n’était pas la première fois qu’il se retrouvait dans cet état, tu le connaissais assez pour savoir qu’il était bagarreur mais cela te faisait toujours le même effet et malgré ses airs durs tu ne pouvais t’empêcher d’avoir envie de le protéger… « Mon Dieu ! Tu es blessé Lucifer ! » T’exclames tu en accourant vers lui oubliant toute ta peur initiale. C’était plus fort que toi, même si tu avais l’air d’une enfant à côté de lui c’était comme si tu te devais de l’aider comme tu le pouvais même s’il ne le voulait pas forcement…

Ton regard s’arrête peu à peu sur toutes les blessures qui parcourent le visage de ton ami. Parce que oui, malgré le fait que tu ne connaisses pas grands choses de plus que son nom, tu avais une telle affection pour lui, que c’était ton ami. Et aujourd’hui, ton ami faisait plutôt peur à voir, sa lèvre était tuméfiée et saignait légèrement, de plus, son œil était aussi en mauvais état et tu avais envie de le prendre dans tes bras comme si cela pouvait calmer la douleur… Mais tu ne le fis pas, parce que cela ne se faisait pas, que tu ne désirais pas entrer dans sa sphère personnelle mais aussi parce que tu savais bien que cela ne se faisait pas. Il n’y avait que toi pour apprécier ce type d’affection à tout moment… Tu avais surtout l’impression que tu étais la seule à en avoir besoin. Avoir besoin d’en recevoir et d’en donner… Lucifer ne comprendrait pas. Il n’était même pas au courant de la raison qui t’avait poussée à rejoindre les rangs de l’école de Poudlard. Il ne savait pas que là-bas, en Amérique, tu avais abandonné ton enfant et que tu avais perdu une partie de toi avec lui… Et même s’il savait, comment pourrait-il comprendre ? Et comment pourrait-il comprendre que de ce fait tu aies besoin de déverser tout cet amour sur lui ? Toi-même tu ne comprenais pas vraiment pourquoi tu faisais ça, pourquoi c’était tombé sur lui alors que lui ne voulait pas être protégé. Alors tu te contentas de lui envoyer toutes les ondes positives que tu possédais malgré tout pour le soutenir. Tu ne savais pas trop si tu allais l’aider à tenir debout, finalement tu entoures son bras de tes deux mains pour l’empêcher de retomber si jamais cela devait arriver et fronça les sourcils alors qu’il te maintient que cela va aller sans problèmes… Tu avais du mal à te le mettre dans la tête. En même temps tu voyais toujours le verre à moitié vide plutôt qu’à moitié plein, la vie t’avait appris à t’attendre toujours au pire et même le pire que tu pouvais imaginer n’était pas aussi horrible que ce que tu avais l’impression de vivre.

Tu avais envie de lui répondre, de le contredire mais il n’avait pas vraiment besoin de ça alors tu lâchas un « Hum… » Peu convaincue et le suivis jusqu’à l’intérieur des Trois Balais. Bien sûr, l’arrivée de ton ami ne fut pas très discrète, il n’était pas du genre à se fondre dans la masse non plus et ses blessures n’arrangeaient rien, de ce fait, les regards finirent par se tourner vers toi et tu le supportais beaucoup moins bien que ton camarade. Tu n’aimais pas les murmures qui s’élevaient sur ton passage depuis que tu étais arrivée à Poudlard. Certains concernant ton ascendance moldue, que tu détestais surement autant que la détestaient ces sangs purs mais d’autres se posaient des questions par rapport à d’autres choses te concernant. Par exemple la raison pour laquelle tu avais quitté Salem, ou plutôt, la raison pour laquelle on t’avait plus ou moins gentiment éjectée de Salem et ce n’était pas que tu avais particulièrement honte de cet évènement de ta vie mas c’était déjà assez douloureux pour avoir à le répéter encore et encore. A cause de ça, tu étais devenue la fille triste et mystérieuse, trop mystérieuse pour être vraiment innocente. C’était à penser que certaines personnes te prenaient pour une mauvaise personne, peut être pensaient-ils que tu avais quelque chose avoir avec toutes ces choses horribles qui arrivaient au château depuis le début de l’année. C’était ridicule mais on ne pouvait pas savoir ce qui pouvait passer dans la tête des gens. T’asseyant face à Lucifer, faisant attention à ne pas poser les coudes sur une goutte de bière tu continuas à l’observer fixement jusqu’à ce qu’il se décide à te raconter ce qu’il c’était passé. Mais cela ne te rassura pas. Tu n’aimais pas savoir qu’il se battait comme ça pour presque rien, un jour il tomberait peut être sur plus fort que lui et dans ce cas, comment ferait-il ? Il ne s’en sortirait pas avec un simple œil au beurre noir… Surtout si son adversaire avait la brillante idée de sortir sa baguette. Un sort était si vite lancé… La mort si vite donnée… Tu avais peur pour lui. « Tu devrais aller montrer ton œil à l’infirmière, ce n’est vraiment pas beau à voir… » Te contenta-tu de dire pour ne pas le froisser un peu plus avec tes manières de petite fille sage. Mais tu savais très bien qu’il n’accepterait pas de se faire soigner, « il en avait vu d’autres » comme il disait si bien mais toi tu savais bien qu’une fois suffisait amplement. Alors, lui faisant un léger sourire je me relevai et me dirigeai rapidement vers le comptoir pour aller y demander un sac de glace, qu’au moins, s’il ne voulait pas se rendre à l’infirmerie il mettrait au moins cela sur son œil. Il n’aurait pas le choix, tu savais être très persuasive quand tu t’y mettais… Te rasseyant quelques secondes après en face de lui tu lui tendis le sac : « Met ça sur ton œil, ça l’empêchera de trop gonfler… » Faisant glisser tes doigts dans tes cheveux tu te mords doucement la lèvre et finis par demander à nouveau oubliant ton envie de ne pas le froisser : « Tu ne devrais pas te battre comme ça… Je ne dis pas que tu n’es pas fort mais, si jamais tu tombes sur quelqu’un de plus fort… Je ne voudrais pas qu’il t’arrive quelque chose. »

Tu es à la fois contente qu’il accepte ton aide et de l’autre plutôt inquiète de par ses paroles, tu ne veux vraiment pas qu’il prenne mal, qu’il soit blessé et que personne ne soit là pour lui venir en aide et qu’il finisse par succomber de ses blessures. Pessimiste et bien trop imaginative tu l’évoques déjà gisant dans une mare de sang, seul et à l’orée de la mort… Tu ne peux t’empêcher de frissonner et de secouer la tête pour faire disparaitre cette image de ton esprit. Tu n’oublias par contre pas la réflexion qu’il avait faite concernant ton ascendance moldue, tu te doutais bien que ton sang n’allait pas tellement le mettre à l’aise, après tout c’était un Lestrange et ce n’était personne d’autre que son cher cousin Rohàn qui faisait de ta vie un enfer depuis que tu étais entrée à Poudlard… Mais après tout, lui aussi avait un pied du côté des moldus d’après ce que tu en savais, c’était surement pour cela qu’il ne te méprisait, qu’il ne te maltraitait pas autant que les autres membres de sa famille… « Oui… Malheureusement, je connais. » Lâcha-tu doucement en faisant glisser tes doigts sur ton verre pensive. Ce n’était pas la première fois que tu crachais sur tes origines. Tu savais très bien que tout aurait été bien plus facile si tu n’avais pas eu ces parents, si tu n’étais pas née le cul entre deux chaises. Tu aurais même préféré naitre moldue que te retrouver dans cette situation… Mais tu te cachais bien de le dire désormais, parce que tu détestais surement autant les moldus que les sangs purs détestaient les sangs de bourbes dans ton genre. Parce que tu avais perdu toute affection pour eux lorsqu’ils avaient décidé de t’arracher ton enfant. Pas seulement tes parents, mais tous les moldus, tu les haïssais pour leur étroitesse d’esprit et pour leur lâcheté… Pour tout ce qui faisait qu’ils te détestaient eux aussi… Tu comptais bien leur rendre, une fois tes études terminées, une fois que tu aurais pouvoir de vie ou de mort seulement armée de ta baguette, tu leur ferras payer ce qu’ils t’avaient fait subir. C’était peut-être ça qui faisait que tu suivais encore les cours dans l’enceinte de l’école, parce que cela te permettrait de te venger, le moment venu. L’écoutant tout en continuant à triturer les bords de ton verre à moitié vide avant de finir par dire doucement un léger sourire au coin des lèvres les yeux encore emplis de tes rêves de vengeance : « Tu ne devrais pas être si défaitiste Lucifer… » Triste ironie, c’était l’hôpital qui se foutait de la charité… Tu te mordis la lèvre agacée. Encore une fois, le langage des moldus laisse imaginer d’où tu viens et il faudra que tu changes ça…

Tu ne sais pas tellement quoi lui dire, tu n’as pas réponse à tout, mais tu as envie de le voir heureux, et tu ne sais pas pourquoi cela te tient tellement à cœur… Le fait est qu’il y a quelque chose de brisé en lui qui te forçait à vouloir prendre soin de lui… Comme le ferait une mère apparemment… Et les choses qu’il venait de te confier ne faisait qu’augmenter cette envie. Appuyant tes coudes sur la table tu posas ta tête sur un de tes poings avant de dire doucement « J’ai jamais été très à l’aise avec la magie, surement parce que… mes parents, ces chiens, ont fait que je n’ai pas baigné depuis toute petite dedans, mais y’avait mes camarades de Salem, ils ont fait en sorte que je m’améliore. Je n’ai jamais été une bête pour ce qui était des sortilèges, et puis, j’ai raté un paquet de cours cela ne m’a pas aidé. Mais s’il y a bien quelque chose que je sais c’est que la magie ne laisse aucun sorcier de côté, si le changement d’air t’as quelque peu perturbé, cela ne devrait pas tarder, dans le cas contraire, je ne peux que te conseiller de te tourner vers tes amis… Ils sont toujours de bon conseil, les amis… » Tu es bien placée pour le savoir, le Choixpeau savait bien de quoi tu avais besoin pour retrouver un équilibre, et c’était d’amis fidèles qui ne chercheraient pas à te juger ou à te changer mais plutôt à te comprendre… Pour le moment cela n’avait pas tellement d’effet sur toi, tu refusais de t’ouvrir parce qu’ils te prendraient surement pour une folle malgré toute leur bonne volonté mais aussi parce qu’ils essaieraient de te mettre dans la tête que Jarod s’était moqué de toi pendant tout ce temps et tu n’arrivais pas encore à voir la vérité en face. Personne ne pouvait rien prouvé, toi, tu savais qu’il t’aimait. Buvant une autre gorgée tu fais un nouveau sourire, essayant de le rassurer et reprends d’une voix douce : « Pour ce qui est du patronus… Il me semble que nous sommes nombreux par ici à avoir des problèmes avec ce sortilège… De mon côté si à Salem j’ai réussis à le faire apparaitre quelques fois… Depuis un an ça m’est devenu impossible, surement parce que comme toi, je n’ai pas, ou plus, de souvenirs assez heureux pour le faire… Mais au fond, tu sais, il me semble que l’on n’ait pas vraiment besoin d’une sentiment de joie absolu… Personnellement, le souvenir auquel je pensais était juste un rêve, quelque de rassurant, un espoir… Tu pourrais peut-être essayer cela si jamais… » Tu laisses échapper un léger soupir en pensant à ce rêve de vie meilleure avec tes parents qui s’est envolé en même temps que tes espoirs de pouvoir voir grandir ton fils. « Mais au pire, les détraqueurs ne me paraissent pas tellement prêts à nous attaquer… Mais tu me diras on sait jamais. » Finis-tu avec un léger rire dans l’espoir de détendre un peu l’atmosphère quelque peu tendue. Tu savais que Lucifer méritait mieux que les doutes qu’il se mettait en tête mais tu savais bien que tu ne pourrais pas lui sortir cette idée de la tête comme personne ne pouvait la sortir de la tienne. Et tu te sentais d’autant plus mal que tu n’avais aucune solution à lui proposer du côté social de la chose. « Et pour ce qui est de Kaëna et de tes cousins… Je dois t’avouer que je n’ai, à mon grand désespoir, pas de conseils à te donner, si l’on peut dire ça comme ça, je n’ai pas vraiment eut d’expériences agréables concernant… La famille et les amours… Enfin, si tu as besoin, envie de parler… » Parce que malgré tout, tu n’étais pas aveugle et que tu savais bien que tes relations sociales étaient carrément foireuses…

Tu te dis qu’il se trompe de croire qu’il ne pourra vraisemblablement jamais aimer, c’était impensable, tout le monde rencontrait quelqu’un qui faisait battre son cœur un peu plus fort. C’était peut-être seulement qu’il n’avait pas trouvé cette personne ou alors qu’il n’était pas près… D’après ce qu’il te disait, il semblait même qu’il n’avait jamais été témoin de preuve d’amour à son encontre, comment aimer quand jamais personne ne nous avait aimés avant ? Toi-même tu finissais presque par oublier la sensation que cela procurer, de te retrouver face à un être aimant, à un être aimé, tu finissais par oublier tous ces petits bonheurs qui paraissaient anodins quand tu vivais chaque jour avec eux. Ces gens qui rendaient la vie plus belle sans même s’en rendre compte. Il y avait tous ces petits gestes  bénins, ces regards tendres, ces sourires qui illuminent une journée… Tu redoutais le jour où cette sensation de joie disparaitrait. Parce que tu voyais bien que c’était quelque chose qui pouvait manquer terriblement… Lucifer lui qui n’avait jamais connu ça avait l’air amer lorsqu’il en parlait. Toi qui l’avait connu était amère de ne plus le vivre au quotidien mais c’était différent… Ton frère disait tout le temps que tu tombais amoureuse comme tu tombais d’une chaise, surement parce que tu tombais amoureuse des mauvais garçons, de ceux que ton frère n’aimait pas et qui t’en ont fait voir de toutes les couleurs. Et pourtant, il n’avait jamais tenté de te dissuader de vivre ta vie comme tu l’entendais, il l’aurait surement voulu mais tout le monde savait bien qu’il  n’avait jamais été du genre démonstratif, protecteur silencieux il veillait juste à ce que tu ne prennes pas trop mal, maintenant il n’était plus là… Au fond, c’était peut-être mieux comme ça, il n’aurait surement pas apprécié de te voir dans un tel état, réduite à haïr ceux qui t’ont donné la vie dans l’espoir de faire oublier tes erreurs passées.

Tu soupires doucement en buvant les dernières gorgées de ta boisson avant de relever les yeux vers ton camarade, une lueur de tendresse dans le regard : « Tu n’es peut être juste pas prêt pour ça, tu sais, aimer, c’est une chose qui n’oublie personne, qui ne laisse personne sur le bas-côté comme le ferait la chance. Je ne suis peut-être pas particulièrement bien placée pour donner des leçons mais il me semble que tu devrais être en phase avec toi-même bien avant de pouvoir aimer sincèrement un autre… Si Kaëna n’allume pas cette petite étincelle dans tes yeux… Elle n’est peut-être pas la bonne, ou alors c’est que, et je l’espère pour vous deux, tu n’es pas prêt. Ne te force pas, cela te tombera dessus bien assez vite. » Enonce-tu avec une certaine conviction essayant de maitriser ta voix. A chaque fois que tu te mettais à parler d’amour, ou de famille, tu avais la gorge nouée. Cela n’aurait pas été étonnant si quelques larmes avaient perlé au coin de tes yeux… Tu étais bien trop sentimentale, bien trop sensible pour supporter de tels souvenirs. C’était bien trop douloureux pour ton palpitant écorché. Tu n’avais qu’une envie, oublier tous ces souvenirs et pouvoir parler avec tes nouveaux camarades sans que tes pensées ne soit sans arrêt tournées vers l’autre côté de l’Atlantique. Ta vie ne se passait plus en Amérique, mais ton esprit s’y trouvait toujours, c’était ridicule.  Tu n’aimais pas ça, tu aurais voulu oublier… Il y avait un sortilège pour ça, mais cela faisait partie de toi, comme les différentes cicatrices qui barraient tes jointures et celle que tu arborais à l’arcade. Tu n’étais pas du genre à chercher les ennuis mais ils te trouvaient toujours.

Tapotant doucement le dos de la main de Lucifer d’un geste qui se voulait réconfortant tu sentis ton regard se refroidir lorsqu’il fit en sorte de tourner la conversation sur ton sujet. Tu regrettais de te rendre sur cette pente glissante. Ton mensonge était assez bien rodé pour qu’il te croie, mais l’interprétation était toujours ce qui te faisait défaut. Haussant les épaules tu baisses les yeux et reprends : « Oh… Moi, je n’ai pas la prétention d’avoir fait quelque chose qui laisse une trace dans l’institut… J’aurais bien aimé, crois-moi, mais c’est simplement de mauvais résultats qui m’ont menées à me faire… éjecter. » Tu laisses échapper un léger rire agacée par ton incapacité à mentir. Cela t’aurait été bien utile à Salem, histoire de cacher ta grossesse mais on t’avait appris à ne pas mentir… Saleté d’éducation à la con. « C’est ridicule. » Lâchas-tu en secouant à la tête les poings serrés sur la table. Tu soupiras une nouvelle fois, au fond, il valait peut être mieux dire la vérité, par la suite, les gens oublieraient… Ce n’était qu’un mauvais moment à passer. Peut-être. Cela valait surement le coup d’essayer. « T’as raison, je ne suis pas une méchante fille, et pas une bonne menteuse non plus j’ai envie de te dire… Je dois t’avouer que… J’ai été amicalement invitée à quitter l’école de Salem lorsque les familles influentes ont appris qu’un des leurs, un sang pur, m’avait… Mise enceinte, moi une sang de bourbe, j’ai été idiote de croire qu’ils comprendraient. Ce sont tous les mêmes… » Tu hausses les épaules, ne trouvant pas cela si douloureux après tout « Mes parents ne m’ont plus jamais adressé un mot par la suite, obligée de quitter Salem, il parait que Poudlard a été la seule école à bien vouloir m’accueillir. » Tu te mordis la lèvre, inquiète de la réaction qu’il pourrait avoir. Si c’était la même que son frère, il aurait peut-être mieux valut que tu te taises pour de bon. Tu ne savais pas s’il était vrai qu’aucune autre école n’avait voulu t’accueillir, c’était ce que t’avais dit ton ex-directeur. Un grand homme… Qui ne t’avait pas tourné le dos lorsque tu étais au plus mal et qui avait fait en sorte d’améliorer un tout petit peu ta situation malgré le fait que tu t’étais mise dans le pétrin le plus total. Relevant doucement ton regard vers lui, des larmes ayant cette fois perlées autours de tes yeux tu reprends la voix un peu brisée  « Tu dois me trouver… Idiote, ou abjecte, je sais à quel point la pureté du sang est importante pour toi… Je n’ai pas voulu salir sa lignée ou je ne sais quoi d’autre… Et contrairement à ce que ton cousin pense, je ne suis pas la petite pute préférée des sangs purs… Jarod… Etait différent. Enfin tu dois me trouver bien naïve. » Tu soupires à nouveau et finis simplement, te préparant à quitter l’endroit si jamais sa réaction n’était pas tellement celle que tu aurais pu espérer. « Si ça ne t’ennuie pas… Tu pourrais éviter d’en parler ? S’il te plait ? »

« Tu ne t’y attendais pas n’est-ce pas ? Peu de monde est au courant… Enfin, après, les rumeurs m’ont précédée malgré tout ce que j’ai fait pour l’éviter... » Lâches-tu dans un soupir. Bien sûr qu’il ne s’y attendait pas, chaque personne à qui tu avais révélé ton secret  avait affiché le même air ahurit à la fin de ton histoire. Parce que personne n’aurait jamais cru que tu pourrais tomber aussi bas. Ou bien que tu aies pu vivre une telle histoire… Toi la petite née moldue de Louisiane… Ce n’était pas grave, tu préférais que cela ne soit pas si facile à deviner. Malheureusement, peu de monde savait tenir sa langue dans ce maudit château et ton secret s’était vite ébruité. Il n’y avait heureusement que peu de personnes qui s’intéressaient aux malheurs d’une personne comme toi. Et tu te serais bien passée de celle qui en profitait pour avoir l’ascendant sur toi, notamment le fils Lestrange. Tu ne voulais pas le dénigrer auprès de Lucifer, après tout, il faisait partie de sa famille même s’ils n’étaient apparemment pas en très bon terme mais bon, au point où tu en étais, autant dire tout haut ce que tu laissais deviner par tes regards et tes soupirs. « S’il n’y avait que le venin de cette vipère je m’en sortirai, j’ai pris l’habitude, quand on né moldu à Salem on est jamais à l’abri… Même si Jarod faisait tout pour…. Enfin bref ! S’il n’y avait qu’Alesya… Personnellement, celui qui m’inquiète le plus c’est Rohan… Il n’est peut-être pas aussi blessant que sa sœur mais il a… plus de forces et je préfère éviter de me retrouver entre ses mains, sans vouloir offenser ta cousine bien sûr. » Tu ne pouvais t’empêcher de marcher sur des œufs, tu avais peur de ce que le frère et la sœur pourraient te faire subir encore…

Tu es quelque peu étonnée par la réaction qu’à Lucifer, et pas en mal, loin de là. Il tentait de te réconforter, de t’empêcher de sombrer totalement malgré le fait que tu en avais follement envie. Depuis quelques temps, c’était de plus en plus dur à supporter et malgré tout ce que tu avais pu croire, cela te faisait plutôt du bien de te confier. Tu aurais cru que le Lestrange aurait mal réagit, cela aurait été à prévoir vu son nom et sa réputation mais il t’avait ravie de ne pas te rejeter. Cela te montrait qu’il y avait encore des personnes qui ne jugeaient pas par les choses que tu n’avais pas pu éviter. Tu n’avais pas pu éviter d’être de sang moldu, tu n’as pas pu éviter de tomber amoureuse de Jarod à tel point que tu n’arrivais plus à être éloignée de lui plus de quelques heures sans sentir ton cœur se déchirer dans une lancinante douleur. Il était comme ta dose d’oxygène et personne n’avait jamais compris à quel point tu avais pu avoir envie d’un enfant avec lui. Certes, c’était arrivé un peu tôt… Mais tu l’avais imaginé des centaines de fois. Un mélange de toi et de lui… L’amour cela ne se commande pas, et personne n’avait l’air de le comprendre. Parfois tu t’en voulais presque d’être plus humaine que la plus part des élèves du château, cela aurait été plus facile dans le cas contraire. Mais d’un autre côté… Il y avait cette joie de se sentir vivante, de sentir ton cœur faire un bond, ou manquer un battement, au fond, tu préférais sentir la tristesse ou la colère plutôt que ne rien ressentir du tout. La vie devait être bien monotone quand rien n’avait de couleurs, peut-être au fond était-ce pour cela que tous ces gens s’escrimaient à gâcher la vie des autres, parce qu’ils étaient eux-mêmes extrêmement malheureux. Encore une fois tu cherchais une excuse à tous ces gens qui te faisaient du mal. Lucifer était différent, toutes les émotions étaient exacerbées pour lui, tu savais qu’il avait des problèmes, il se confiait à toi et tu avais l’impression qu’il avait besoin d’être en quelque sorte protégé… Pourtant c’était un peu l’inverse qui se passait, et ce même si tu ne pouvais t’empêcher de faire glisser la glace sur sa main, qu’il tenait dans la tienne. Faisant un léger sourire tu baisses les yeux et répondis doucement en séchant tes larmes du dos de ta main libre :  « Oui tu sais, je sais que tu as raison… Mais je n’arrive pas à pardonner, à mes parents qui ont tout fait pour me gâcher la vie depuis que mes pouvoirs se sont manifestés, à Jarod qui n’a pas levé le petit doigt et qui est trop lâche pour envoyer une simple putain de lettre. Et surtout, à tous les élèves de l’institut et leurs idiots de parents coincés qui ont insisté pour que je ne reste pas à Salem et toute ma putain de vie. » Parce qu’ils avaient fait en sorte de te voler ta famille, de te voler ton foyer et tout ce que tu aimais, tout ce que tu connaissais. Redressant la tête tu finis ton verre d’un trait avant de hausser les épaules, agacée par la tournure actuelle de ta vie : « J’ai juste peur qu’il vive la même chose que moi dans une famille moldue intolérante qui est prête à tout pour conserver les apparences qui l’enfermera à partir du moment où il ne sera plus aussi normal que les autres enfants. Il ne mérite pas de souffrir… Ce n’est pas sa faute si sa mère n’a pas réussis à le protéger, si je n’ai pas réussis à le protéger. » Tu serres les poings, tu te sens mal. Comme si tout était encore plus réel parce que tu lui en parlais. Mais tu n’as pas laissé échapper une seule larme de plus, parce que tu voulais être forte, pour supporter tout ça, pour que Junior n’ai pas autant honte de sa mère que tu avais honte de toi-même.