Le lien entre elles avait toujours été spécial.

Eleonore était la petite sœur qu’Alesya n’avait jamais eu, sa confidente, potentiellement l’amie la plus proche qu’elle pouvait avoir. Jamais la jeune Lestrange n’avait cherché à faire d’elle une de ses suivantes car elle avait une plus haute estime de la jolie blonde. A la place, comme une ainée farouche, elle protégeait la petite Dolohov sans y paraître. Lui parlé avec toujours été une chose aisée, un acte simple. Assises en tailleur sur leur lit, dans le dortoir des Serpentards, il leur arrivait souvent de discuter pendant de longues heures, riant doucement, critiquant ceux qui le méritaient et agissant sans avoir besoin d’action pour détruire les silences ou de masque pour se cacher.

Elles avaient eu leurs différents, bien entendu. Quel genre d’amitié pouvait se vanter de durer au fil des années sans le moindre heurt ? C’était naturel et la plupart du temps, elles se retrouvaient rapidement. Toujours, à vrai dire, même lorsque l’une commetait une faute grave, une faute mettant en cause la confiance qu’elles se vouaient. Récemment, Alesya avait fait une erreur et les choses redevenaient à présent à la normale, la déception dans le regard de la jeune Dolohov n’était plus qu’une ombre qui doucement passait, laissant de la place à une tristesse qu’Alesya ne s’expliquait pas. Sur le coup, elle avait cru que c’était ce secret qu’elle avait gardé qui causait tant de mal, mais à présent, à présent qu’Eleonore savait pour le mariage et s’enthousiasmait pour eux, un peu trop peut-être même, comme s’il s’agissait là d’un couple de longue date se trouvant enfin, s’unissant après de longues années, la batteuse des Serpentard réalisait qu’il y avait autre chose. Qu’elles avaient besoin de parler. Eleonore, même si elle ne le reconnaitrait sans doute jamais, avait besoin de rire, besoin de sourire, besoin de la grande-sœur qu’Alesya n’était pas vraiment.

Alors au cœur de la nuit, la petite brune avait quitté son lit comme une gosse en colonie de vacances et elle était venue s’assoir au chevet de sa camarade, la réveillant doucement, tirant les rideaux du couchage à baldaquins et lui tendant bien vite une bouteille de whiskey pur feu. C’était un rituel vieux de seulement quelques années, une petite nouveauté, quelque chose qui entrainaient des rires et qui facilitaient les aveux dans ce grand dortoir glacé qu’était celui des Serpentards… Elle s’était montrée douce, calme, délicate dans la manœuvre, faisant preuve de cette tendresse qui pourtant n’était pas naturelle, celle qu’elle apprenait doucement à montrer à Ezechiel. Eleonore bénéficiait aussi de ses efforts, toujours, malgré quelques éclats peu fréquents. « Dolohov, réveille-toi espèce de loir ! » chuchota-t-elle en poussant la blonde du bout des doigts, la secouant doucement, sans violence, avec une patience qui ne lui ressemblait pas. Réalisant qu’elle avait envie de parler, réellement envie, qu’elle voulait raconter ce mariage, la façon dont Ezechiel lui avait demandé de l’épouser, la fuite au début de l’été, les sentiments naissant, elle secoua la tête, amusée presque. Ce n’était pas elle, mais au fond, elle n’avait pas envie de lutter, pas ce soir. Elle se disait aussi que se confier pousserait Eleonore à en faire de même et clairement, elle en avait besoin. La voir ainsi, cela la faisait souffrir. Elle qui ne se souciait de personne se faisait briser le cœur par l’air maussade d’une petite jeune femme qu’elle connaissait depuis toujours…

Cela faisait des années qu’avec Ezechiel, ils formaient un trio, un assortiment étrange mais qui fonctionnait diablement bien. Alesya comprenait d’ailleurs qu’elle ai pu lui en vouloir, de ne pas avoir parlé plus tôt de cette union décidée sur un coup de tête. C’était comme mettre la machine en marche sans en prévenir le cœur, c’était presque une trahison. Pendant quelques temps, elle s’était demandée si la jeune Dolohov n’avait pas eu des sentiments pour Ezechiel, des sentiments qui auraient poussé à une dispute parce qu’Alesya lui passait devant, mais elle avait compris qu’en réalité, les choses étaient plus subtiles, moins évidentes.

La poussant à nouveau, elle insista un peu, toujours en murmurant. « El’ réveille-toi, je croyais que tu voulais des détails sur la nuit de noces » plaisanta-elle en se retrouvant à sourire, un vrai sourire sans artifice. Assise en tailleur comme une gosse pendant une soirée pyjama, elle faisait preuve de plus d’humanité que dans l’intégralité de sa courte vie…

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